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Présentation de l’éditeur :
Kuessipan : mot innu signifiant à toi ou à ton tour. Ce sont des lieux, des visages connus et aimés. Des chasseurs nomades. Des pêcheurs nostalgiques. Des portraits. Des vies autour de la baie qui reflète les choses de la Terre. Les lièvres. La banique. Les rituels. Les tambours en peau de caribou qui font danser les femmes. Des enfants qui grandissent. Des vieux qui regardent passer le temps. Des saumons à pêcher. Des épinettes. Des barrières visibles et invisibles. Des plaisirs éphémères. De l’alcool qui éclate les cervelles. Des souvenirs. Des voyages en train. Et surtout l’évidence que la vie est cet ensemble de morceaux à emboîter pour que naisse la symphonie.
Kuessipan est un grand roman, de ceux que l’on relit pour faire partie des hommes et des femmes qui se battent tous les matins pour être sujets de leur propre histoire.
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Voilà un livre que je n’aurais jamais rencontré si je n’avais pas été au Festival America le week-end dernier, et si je n’avais pas été refoulée du débat « Profession écrivain » ; j’ai alors choisi d’aller écouter la Scène « Québec » et j’ai découvert Naomi Fontaine, la plus jeune invitée du Festival, 24 ans, auteure innue et québecoise. Elle a quitté la réserve d’Uashat à l’âge de sept ans pour aller vivre à Québec.
Dans ce livre, qualifié de « premier roman », elle raconte la vie dans la réserve, les gens qui y habitent, qui tentent d’y vivre, d’y survivre souvent, entre la forêt d’un côté et la baie de l’autre, les filles abandonnées par leurs copains, obligées d’élever beaucoup d’enfants avant de penser un peu à elles et de faire des études, les jeunes parfois tentés de s’abandonner dans l’oubli de la drogue, les hommes qui boivent beaucoup trop parfois. Mais il y a aussi un appel de la nature, la chasse, la pêche, il y a les visages ridés des vieux Indiens, les histoires qu’ils racontent, il y a le cimetière où la mémoire de la réserve est gravée dans des pierres dispersées, il y a le bruit du vent et des vagues…
Ce n’est pas un roman à proprement parler, avec un début et une fin, des péripéties identifiables. C’est plutôt un voyage dans la réserve, presque intérieur car le territoire n’est pas très étendu et tout le monde se connaît. C’est un regard sans complaisance sur la misère matérielle et morale, l’oubli , sur les barrières entre les indiens et les blancs, ces barrières qui se franchissent ou s’arrachent si facilement dans la réserve… Mais c’est surtout un hommage à cette culture indienne, innue, un désir de transmettre, de s’appuyer sur le passé pour aller vers demain sans trop de crainte.
C’est aussi une très belle écriture, marquée de simplicité et de lucidité. L’auteur adopte tantôt un regard très extérieur, en parlant à la troisième personne, tantôt un ton plus personnel, elle ne craint pas d’impliquer, de remuer en s’adressant directement à son lecteur.
Naomi Fontaine est une personnalité à découvrir et à suivre !
« J’aimerais que vous la connaissiez, la fille au ventre rond. Celle qui élèvera seule ses enfants. Qui criera après son copain qui l’aura trompée. Qui pleurera seule dans son salon, qui changera des couches toute sa vie. Qui cherchera à travailler à l’âge de trente ans, qui finira son secondaire à trente-cinq, qui commencera à vivre trop tard, qui mourra trop tôt, complètement épuisée et insatisfaite. Bien sûr que j’ai menti, que j’ai mis un voile blanc sur ce qui est sale. » (p. 11)
« La vieille cabane se trouve à 254 milles au nord de Sept-Iles. L’endroit est désert, gardé par d’immenses épinettes. La neige recouvre le lac et le ciel obscur se laisse percer par d’innombrables tisons lactés. Tout résiste dans l’immédiateté. Tout s’oppose au sens commun. Tout repose, les âmes anciennes et les familles en vacances. » (p. 94)
Naomi FONTAINE, Kuessipan (A toi), Editions Mémoire d’encrier, Montréal, 2011
T’es une rapide toi !!!!
Le livre est petit, de petits chapitres courts, une mise en page aérée… ça me permet d’étoffer un peu le mois au Québec ! Et puis j’avais trop envie de lire un des bouquins achetés le week-end dernier.
La couverture est belle.
C’est bien que tu aies ramené un bon livre.
La couverture n’est pas ce que je préfère… 🙂
Quand je suis passée en début d’après-midi, il n’y avait plus un seul exemplaire disponible .. j’irai à la librairie du Quebec à mon prochain passage à Paris.
On m’a conseillé de l’acheter le matin, le livre et la romancière ont eu du succès… Le samedi matin, elle disait qu’au Québec très peu de gens sont intéressés par les débats littéraires comme à Vincennes, elle a dû être ravie !
Dis donc, le festival a laissé des traces!
Compte tenu du poids des sacs qu’Anne transportait, je pense que nous n’avons pas fini de nous régaler de ses impressions sur les livres qu’elle a rapportés de ce festival 😉
Je ne lirai sans doute pas tout tout de suite, patience, Martine 😉
Et si ce n’était que ce livre-là, Keisha !
Comme, à priori, je préfère la littérature d’Amérique Latine, je ne me suis absolument pas arrêtée devant les stands du Nord (excepté « Histoire de réussir » de Russel Banks qui m’a séduite lors de la conférence sur « le rôle de l’écrivain »). Tu me fais regretter d’avoir zappé Kuessipan ! Mais je ne dis pas que plus tard… ce voyage m’attire !
Ah Russell Banks… « Sous le règne de Bone », grand roman d’initiation ! Celui de Naomi Fontaine est touchant.
Le hasard permet parfois de belles rencontres 🙂
Naomi Fontaine et Lucie Lachapelle dans le même débat, et que des histoires d’Indiens du Québec. Sans compter, un peu plus au sud, Louise Erdrich…
Je note, il a tout pour me plaire ! Aifelle a aussi été séduite en écoutant l’auteur.
C’est un roman un peu minimaliste, mais touchant !
Je l’ai vu à la bibliothèque mais je lui ai préféré « Traversée de l’Amérique dans les yeux d’un papillon », je le mets dans ma liste, je crois que les romans « initiatiques » québécois sont des pierres au patrimoine culturel de ce merveilleux pays! Merci pour ce partage!
Si le coeur t’en dit, mon billet sur « Traversée de l’Amérique… »:
http://ecrireenplus.canalblog.com/archives/2012/08/04/24773187.html
Quel joli titre ! J’accours te lire 😉
Le coup de grâce !!
Si tu savais comme je regrette d’avoir manqué sa rencontre-interview à l’espace jeunesse avec les jeunes lecteurs, elle était leur invité, ça devait être formidable.
C’est une petite femme qui n’a pas froid aux yeux ! A la fois charmante et déterminée, je crois.
Je veux la lire aussi. Heureusement qu’il y a des blogs comme le tien qui mettent les auteurs à parité. J’ai vu un challenge sur les Etats-Unis et le festival America circuler sur les blogs et sur les photos il n’y avait comme d’habitude que des écrivains et seulement deux écrivaines. Je crois que c’est une mentalité tellement acquise chez les gens qu’ils ne s’en rendent même pas compte. Comme il n’y avait que 17 auteures invitées au festival América, j’ai décidé de les lire toutes et donc Naomi Fontaine que je ne connaissais pas. Merci Anne pour ce travail de qualité.
J’ai quand même acheté ou fait dédicacer des romans masculins aussi à Vincennes… mais tout compte fait, j’ai acheté Julie Otsuka, Louise Erdrich, Dianne Warren, Elsa Osorio, Eugenia Almeida, Lucie Lachapelle… fait dédicacer Rebecca Makkai… tiens, tiens, plus de femmes que d’hommes, yes !
Merci pour les citations remarquables : elle possède un phrasé court et incisif, un vrai sens de la formule. Je vais tâcher de retenir son nom et de repérer au plus vite son livre. Merci donc pour la découverte (les chemins de traverse ont parfois du bon)
Peut-être peut-on le commander par chez nous… sinon il y a la librairie du Québec à Paris 😉
Je note. Je sais à lire ton commentaire que j’aimerai ce livre. Des quotidiens plus répandus qu’on peut penser, qui deviennent ‘extraordinaire’ en littérature. Merci pour cette belle suggestion!
Un livre qui sort un peu des circuits franco-français 😉
Merci pour cette découverte, et sur un sujet qui me plait toujours autant. Tu as bien de la chance d’être allée au Festival, si cela n’avait pas été une question de budget, j’aurai bien fait l’aller-retour province-paris :-))
C’est vrai que c’est un petit budget, mais ça en vaut la peine ! Une prochaine fois, peut-être…
Cela me semble intéressant ! comme ce festival d’ailleurs :-)) Tu as dû passer un excellent moment !
Si tu en as l’envie et l’occasion, ne le rate pas en 2014 😉
Très tentant, ce livre a tout pour me plaire… Reste plus qu’à le trouver
Il faut peut-être essayer la librairie du Québec à Paris…
Les extraits me plaisent beaucoup…
Tu veux que je le glisse dans l’enveloppe avec Mademoiselle Personne ?
Oh avec plaisir ! Quelle bonne idée !
C’est fait, ils sont partis tous les deux cet après-midi !