Quatrième de couverture (élaguée, elle dit tout, ou presque, de ce court roman !!)

Chaque année, Maurizio passe les vacances d’été chez ses grands-parents à Crabas, un village sarde. En compagnie de Giulio et de Franco Spanu, il y goûte l’amitié et la vie de la communauté qui, en ces lieux, se conjugue à la première personne du pluriel. Ensemble ils multiplient les aventures rocambolesques dans les rues ou sur les rives de l’étang, la fronde au poing, ne se calmant qu’à la nuit tombée pour écouter les histoires de fantômes et de créatures fantastiques que distillent les vieillards, assis devant leurs portes. Mais un jour…

Dans ce deuxième roman de Michela Murgia, la Sardaigne et ses traditions sont toujours bien présentes, comme dans Accabadora, mais sur un mode beaucoup plus léger : c’est l’amitié entre trois garçons le temps des longues vacances d’été qui sert de toile de fond à cette évocation de la vie sarde dans un gros village. Maurizio, personnage à travers lequel nous découvrons l’histoire, ne revient à Grabas que le temps des vacances et il doit donc trouver les codes pour se fondre dans le paysage local. Ces codes, ce sont ceux de la communauté, qui tient (comme dans Accabadora) une grande place, au point qu’il ne suffit pas de savoir manier la fronde et la glu avec compétence mais il faut aussi être capable d’employer le « nous » à bon escient pour être admis et reconnu.

Dans ce village, les gens se racontent des histoires, le soir, peuplées de superstitions, de croyances obscures et de fantômes. Ces croyances populaires vont se déchaîner quand il sera question de créer une seconde paroisse dans le village. Des gens que l’on croyait vivre en harmonie vont déchaîner leurs dévotions et leurs passions dans une comédie humaine rapide, solennelle et… pleine d’ironie.  Le talent de conteuse de Michela Murgia s’épanouit tandis qu’elle entraîne ses trois personnages principaux dans une lutte de quartiers et une jolie épreuve initiatique.

Ce roman n’a peut-être pas la force du premier, mais le temps de quelques étés proches de nous dans le temps (les années 198), il vous transportera dans une époque éloignée, dans le temps de l’enfance éternelle, il vous donnera le sourire et vous procurera une belle parenthèse de légèreté (mais attention, en Sardaigne, la légèreté est toujours assortie de gravité, sinon ce ne serait pas sérieux). J’y ai retrouvé avec plaisir la plume de Michela Murgia et j’attends avec impatience le roman suivant !

« A cet instant, Maurizio avait cessé de se demander ce que l’emploi de ce « nous » signifiait à Crabas. Ce n’était pas un pronom comme ailleurs, mais la citoyenneté d’une patrie tacite où le temps partagé se déclinait à la première personne du pluriel. » (p. 27)

« Les femmes du quartier, qui n’avaient jamais participé, ou presque, à la vie paroissiale, s’employèrent à confectionner des douceurs de toutes sortes pour soutenir la collecte de fonds. Les hommes de la mer ou des champs – lesquels n’avaient jamais, même par mégarde, trébuché sur le seuil de la sacristie – formèrent une confrérie vouée au Sacré-Coeur, non sans avoir obtenu de leurs épouses qu’elles leur cousent des aubes blanches et des mantelets rouges, afin qu’ils puissent conduire en procession jusqu’au cimetière les défunts de la nouvelle communauté, à l’image de la confrérie du Rosaire dans la paroisse de Santa Maria. (…) Désormais, dans les bars du centre, même les vieillards se cataloguaient mutuellement en déclinant leurs appartenances paroissiales, bien qu’ils eussent tous préféré mourir noyés plutôt que d’être surpris en train de pénétrer dans une des deux églises. » (p. 71-72)

Michela MURGIA, La guerre des saints, traduit de l’italien par Nathalie Bauer, Seuil, janvier 2013

C’était une lecture commune avec Argali (en fait, je l’ai lu avant de l’emballer pour le swap de printemps et nous nous sommes proposé de publier nos billets le même jour… ;-)) Clara l’a lu aussi.

Un roman féminin et un italien pour le challenge Voisins voisines. Un petit roman de 120 pages qui se passe sur une île

Voisins Voisines version Curlz    logo La plume au féminin

 Défi 100 pages