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Isabelle Baldacchino, Le manège des amertumes, nouvelles, Quadrature
Quatrième de couverture :
« Oh le comédien! Oh l’artiste! Applaudissez, messieurs-dames, l’illusionniste entre en piste. Il est majestueux, il est magnifique:quelle splendeur d’hypocrite, quel perfide. Admirez sa technique, acclamez ses fourberies. Il dit Madame, il pense catin. Quel poète! »
Les personnages d’Isabelle Baldacchino s’entrecroisent, se répondent ou s’ignorent en choisissant le trottoir d’en face. Une marche d’escalier, une rue, une cave sont les lieux où ils vivent, où ils passent, où la tragédie côtoie insolemment la légèreté. Toutes ces nouvelles se suffisent à elles-mêmes, mais l’auteure s’est employée à tisser des liens. Retrouvez-les ou laissez-vous mener jusqu’au dernier texte qui résonnera en vous comme un écho.
Dans ce premier recueil de nouvelles, Isabelle Baldacchino fait valser ses personnages sur un manège de blessures, de fêlures, de silences que l’on soupçonne à peine : tantôt enfouies au fond des coeurs, des consciences, tantôt bien cachées sous une apparence plus que respectable, elles vous laissent un goût de regret, de chagrin mal lavé, de mélancolie… Mais rassurez-vous, elles ne vous plomberont pas le moral, car derrière la porte que l’on referme, sur la page du journal intime, dans les souvenirs en lambeaux d’une vieille femme, il y a aussi de l’auto-dérision, une sorte de « politesse du désespoir » qui empêche de se noyer tout à fait dans l’amertume…
Vous le savez sans doute, je n’aime pas beaucoup les formats très courts en nouvelles, mais là… j’ai été séduite par l’art de l’auteure d’esquisser un portrait, une ambiance en quelques lignes, de jouer sur l’implicite, sur le fil fragile tendu entre les êtres. Au fil des pages, j’ai été particulièrement touchée par ce « Puer dolorosus », ce vieil homme qui a perdu sa mère à l’âge de douze ans et par l’héroïne malgré elle des « Listes », remuée par les personnages inadaptés que sont « Le lecteur » ou celui du « Festin de nuit », glacée par « Emilie ».
Oui, Isabelle Baldacchino a composé pour ce Manège des amertumes une musique douce-amère, emplie de nostalgie. Et comme elle ne peut sans doute laisser ses personnages se perdre dans l’oubli, elle tisse entre eux des liens bien émouvants au coeur de la dernière nouvelle, « Entremêlés ». Alors on n’a qu’une envie : relire les secrets de ces hommes et de ces femmes, attendre avec impatience d’autres textes, refaire un tour de manège…
« Ma vieillesse a été douce, tu sais. Ma mort le sera sans doute aussi. Je ne la crains pas. Pour une fois, elle est juste. Un monsieur âgé et qui a bien vécu, voilà ce qu’on dira de moi. Personne ne remarquera cette petite fêlure au fond de mon âme, une minuscule entaille, toute fine où perle à peine le sang de l’abandon. Un voisin aurait dit : Depuis le temps, il s’en est remis ».
S’en remet-on jamais ? » (p. 51)
Isabelle BALDACCHINO, Le manège des amertumes, Quadrature, 2013
Le blog de l’auteure
L’avis de Fattorius (que je rejoins dans sa surprise sur « l’orthographe nouvelle »)
Encore une participation au mois de la nouvelle chez Flo et à la découverte des éditions Quadrature chez Mina (j’ai gardé le meilleur du mois pour la fin !) Et un titre pour la contrainte du mois.
Moi j’adore ce format …. merci pour ce titre que je ne connais pas !
Je continuerai à lire Isabelle Baldacchino avec plaisir, c’est sûr !
J’ai rencontré l’auteure à la foire du livre à Mons. J’ai lu son recueil. C’est surtout la dernière nouvelle où on retrouve les différents personnages que j’ai aimée.
Bonne fin de soirée et merci pour ta participation à mon challenge.
Il a tout pour me plaire de recueil de nouvelles, je note.
Un titre un peu triste, tout de même.
Plutôt grinçant, dirais-je.
J’aime beaucoup ton billet mais je ne suis pas sûre que j’aimerais les nouvelles (« contrariante » est (un de mes) mon second(s) prénom(s)… ;). Quand le recueil avait été annoncé, j’avais passé mon tour et je crois que je reste sur cette position finalement.
(je ne sais pas si tu as lu « Uniques » de Dominique Paravel mais ce court roman me fait penser, en termes d’ambiance et de construction, à ce recueil d’après ce que je saisis à son sujet. Je précise que j’ai énormément aimé le roman de D. Paravel).
En effet tu es contradictoire (je dirais ça plutôt que contrariante) 😉
En fait, je crois qu’une personne peut parler avec talent d’un livre qui ne me fait pas envie. Ainsi, je distingue la qualité du billet (qui me donne envie de supprimer tous les miens – j’ai horreur de mes billets en général donc ça n’arrange pas les choses :S) de son sujet qui ne m’inspire pas nécessairement. La réciproque est rare car il est difficile de donner envie de lire un livre qui a tout pour lui en en parlant mal…
Je te laisse le choix quant à la désignation de ma pathologie 😉
On aime l’autoflagellation, je vois 😉 C’est bien de pouvoir séparer bon billet et non-envie, ça limite les dégâts pour la PAL !
Je viens de le terminer et l’ai beaucoup apprécié (merci de m’avoir permis de le découvrir !) Ce qui est amusant à présent que je reviens lire ton article, c’est de voir à quel point nous n’en avons pas gardé la même image. Si tu es restée sur l’émotion de certaines nouvelles, j’ai tendance à me rappeler avant tout l’humour de l’auteure, ces touches d’autodérision et le sourire un peu féroce qui plane sur certains textes. Je relirai moi aussi avec plaisir Isabelle Baldacchino, surtout si elle garde cette plume incisive.
Dans la petite conversation qu’on a eue ensemble, Isabelle Baldacchino souligne cet humour, cette ironie, elle aime ça ! Donc tu es encore meilleure cliente que moi pour la dame 😉