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Quatrième de couverture :
À l’âge de cinquante-neuf ans, Fiona Maye est une brillante magistrate spécialiste du droit de la famille. Passionnée, parfois même hantée par son travail, elle en délaisse sa vie personnelle et son mari Jack. Surtout depuis cette nouvelle affaire : Adam Henry, un adolescent de dix-sept ans atteint de leucémie, risque la mort. Les croyances religieuses de ses parents interdisant la transfusion sanguine qui pourrait le sauver, les médecins s’en remettent à la cour. Après avoir entendu les deux parties, Fiona décide soudainement de se rendre à l’hôpital, auprès du garçon. Mais cette brève rencontre s’avère troublante et, indécise, la magistrate doit pourtant rendre son jugement.
Ce mois anglais a été l’occasion de sortir de ma PAL un bien beau cadeau : L’intérêt de l’enfant, que j’ai refermé avec le « petit » tressaillement au coeur qui vous gardera le livre en mémoire pour longtemps. Ce roman était d’ailleurs parfaitement adapté à la période puisqu’il se déroule principalement pendant un mois de juin particulièrement frais et humide, un peu comme le nôtre jusqu’ici…
Le personnage de la juge Mayes est magnifique : à travers elle, Ian McEwan nous dresse le portrait d’une juge au sommet de sa carrière professionnelle, d’une femme qui commence à vieillir, d’une épouse absorbée par les affaires familiales qu’elle traite dans son métier et qui a laissé son couple s’étioler, d’une Anglaise chic et cultivée qui maintient ses émotions dans les limites strictes du flegme britannique. Tandis qu’il dessine ce portrait, l’auteur évoque des histoires de famille, des conflits, des questions morales sensibles de la société actuelle, le fonctionnement de la justice et c’est passionnant.
Alors que son mari est parti tenter l’aventure ailleurs, Fiona est confrontée à un cas particulier : celui d’un jeune homme presque majeur qui refuse un traitement par transfusions sanguines au nom de sa foi en Jehovah. Obligée de juger en urgence, Fiona Mayes prend cependant le temps de rencontrer le jeune Adam, ne se doutant pas que leur conversation et le jugement qu’elle va rendre vont bouleverser le cours de leur vie à tous les deux.
Il m’a semblé que Ian McEwan jouait subtilement sur le dedans et le dehors (l’appartement les rues de Londres, la chambre d’hôpital, le tribunal, la tournée de jugements dans différentes villes anglaises, un petit salon dans un manoir) pour accompagner ces aler-retour entre vie intime, vie privée et vie professionnelle. La poésie anglaise et la musique des lieder allemands parsèment les pages du roman, permettant l’expression des sentiments. C’est sobre et élégant, tendu et profond. La fin est sublime et bouleversante. Ian McEwan est décidément un grand auteur anglais et un auteur universel.
« Dans les années quatre-vingt, un juge aurait encore pu placer l’adolescent sous tutelle judiciaire et le rencontrer au tribunal, à l’hôpital ou chez lui. A l’époque, un idéal plein de noblesse avait par miracle survécu à la modernité, cabossé et rouillé comme une armure. Au nom du monarque, les juges avaient été des siècles durant les gardiens des enfants de la nation. Désormais, les travailleurs sociaux les remplaçaient et rendaient compte de leur mission. Lent et inefficace, l’ancien système préservait le contact humain. Désormais il y avait moins d’attente, et davantage de cases à cocher, de rapports à croire sur parole. La vie des enfants étaient archivée dans la mémoire des ordinateurs, avec exactitude, mais un peu moins de bienveillance. »
« Malgré le tambourinement des gouttes sur son parapluie, elle entendit l’andante harmonieux, la cadence de la marche, tempo rare chez Bach, un beau chant insouciant qui s’élevait au-dessus de la basse continue, ses propres pas accompagnant cette mélodie aérienne et enjouée tandis qu’elle arrivait devant Great Hall. »
« Toute une vie professionnelle passée au-dessus de la mêlée, à défendre puis à juger, à s’autoriser en privé des commentaires condescendants sur la méchanceté et la bassesse des couples en instance de divorce, et voilà qu’elle était condamnée à frayer avec ses semblables, à nager en désespoir de cause dans le sens du courant. »
Ian McEWAN, L’intérêt de l’enfant, traduit de l’anglais par France Camus-Pichon, Gallimard, 2015
Un sujet original qui semble avoir été traité avec beaucoup de finesse. Merci du partage !
Beaucoup de finesse psychologique, en effet. Bonne découverte.
Lu, bien sûr, tellement j’aime l’auteur
Entièrement d’accord, M’dame 😉
Ce livre a été adapté au cinéma en 2018, sous le titre de « The Children Act » (ou « en français » de « My Lady ») avec Emma Thompson dans le rôle de la juge Mayes. C’est Ian McEwan qui a écrit lui-même le scénario. Et j’ai beaucoup aimé le film. J’ai lu le roman après coup, que j’ai également beaucoup aimé.
Je n’ai pas vu le film, je voulais lire le roman d’abord. J’espère en avoir l’occasion.
un livre que j’ai beaucoup aimé et qui m’avait touché moi aussi
l’adaptation ciné avec Emma Thomson est pas mal
J’aime beaucoup cette actrice, j’espère que le film passera un jour sur une chaîne francophone.
C’est un roman particulièrement bien fait… j’ai lu récemment un court recueil de nouvelles de Ian (ne me demande pas d’où je me permets cette familiarité) et ai été vaguement déçue, mais avec ses romans, jamais !
J’en ai encore deux dans la PAL, de la réserve si le suivant tarde 😉
Excellent roman, et effectivement son adaptation cinématographique est réussie !
J’espère qu’elle passera un jour à la téle (j’adore Emma Thompson).
Et bin tout un livre qui semble reussi…oui didonc…cela donne envie
C’est un très grand auteur anglais.
Mazette, un coup de coeur, et je n’ai jamais lu l’auteur… tu me m’aides pas à rester concentrée sur mes piles 😉 . J’espère que tu apprécies ta lecture du Dimanche des mères, j’avais beaucoup aimé cette lecture.
Qui a dit que les blogs étaient une source de concentration ? 🙂 J’ai bien aimé Le dimanche des mères sans que ce soit un coup de coeur, billet demain.
Je l’ai justement emprunté la semaine dernière à la bib, en format audio. Il a donc rejoint ma PAL audio qui débordent d’urgence donc je ne sais quand je lirai ce roman, mais en tout cas, il est déjà entre mes murs !
Si tu as le temps de l’écouter, je lirai ton avis avec plaisir !
Un titre que j’ai noté, mais pas encore lu. Merci pour ce rappel en guise de confirmation.
Je ne lis pas énormément de nouveautés toutes récentes, ça permet des rappels utiles 😉
J’avais lu Atonement et étais restée sous un enchantement qui a duré longtemps…
C’est Epiation en français, c’est ça ? Souvenir inoubliable de même que le film !
C’était mon premier Ian McEwan et j’étais assez mitigée pendant ma lecture (le thème, les personnages ne me parlaient pas), mais la fin a rétabli les choses. Petit tressaillement au coeur, oui je crois bien que c’était ça.:)
Tu préfères des choses plus déjantées qu’une juge très investie dans son travail 😉 La fin, où la musique sublime les sentiments, est magnifique !
J’ai vu le film que j’ai adoré et j’ai acheté le roman pour pouvoir le lire.
Pas vu le film, il fallait que je lise le roman d’abord.