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Présentation de l’éditeur :
Je ne sais pourquoi, j’avais peur de ce livre, je craignais d’y trouver une violence physique et une description de la guerre insupportables. Mais je me suis laissé convaincre par la charmante demoiselle de la Librairie du Québec à Paris et bien m’en a pris. Mais comme il m’est difficile de parler de ce roman !
Dans un pays jamais nommé, qui pourrait être le Liban ou la Palestine, deux frères jumeaux inséparables vont partager et porter le poids, le prix du sang. En quelques pages denses et poétiques, douloureuses et lumineuses, se déploient les thèmes de la paix (dans cette orangeraie si symbolique de l’appartenance à une terre), de la violence aveugle, de la vengeance, du martyre, de la manipulation. Car c’est à des enfants que l’on demande de venger la mort de leurs grands-parents en allant se jeter sur un ennemi lointain, inconnu et d’autant plus diabolisé. Deux enfants, deux parents qui sont acculés à faire des choix, à sacrifier l’un contre l’autre.
Avec sobriété, Larry Tremblay fait le récit de ces jours passés à tourner et retourner le choix dans la tête et le coeur, sous un soleil qui finit par écraser autant que la main du chef vengeur. Le thème du double, dans la personne des jumeaux Amed et Aziz, nous renvoie comme un miroir à deux faces, où le sacrifié hante définitivement la mémoire du survivant. Deux personnages qui symbolisent l’ambivalence des sentiments, l’écartèlement moral et physique auxquels ils sont livrés.
Tout se « dénoue » sur une scène de théâtre, des années après le drame, de l’autre côté de l’océan. Rien d’étonnant à cela car Larry Tremblay est d’abord un auteur de théâtre. C’est là que se révèle le dessous des cartes, dont on se doutait bien qu’elles étaient truquées dès le départ. Et resurgissent avec acuité les questions de la manipulation, de l’endoctrinement, de la réalité de guerres qui sont tellement éloignées de nous ou que nous croyons connaître.
Et malgré qu’il m’ait manqué un peu d’émotion, ce roman resserré et intemporel prend encore plus de sens. J’ai l’impression que les Canadiens ont une grande sensibilité aux conflits du Proche et du Moyen-Orient : j’ai pensé au film Incendies, que j’avais beaucoup aimé.
Car ce pays pourrait être le Liban ou la Palestine. Ou la Syrie ou la Lybie… ou…
« Tamara ne parlait pas souvent avec son mari. En fait, elle préférait leurs silences à leurs habituelles disputes. Ils s’aimaient comme ils devaient s’aimer sous le regard de Dieu et des hommes.
Souvent, avant de retrouver son mari déjà couché, elle allait dans le jardin. Elle s’assoyait sur le banc placé devant les roses trémières et respirait les odeurs riches qui montaient de la terre humide. Elle se laissait bercer par la musique des insectes, levait la tête en cherchant la lune des yeux. Elle la regardait comme si c’était une vieille amie qu’elle venait rencontrer. Certaines nuits, la lune lui faisait penser à une empreinte d’ongle dans la chair du ciel. Elle aimait ce moment où elle se tenait seule devant l’infini. Ses enfants dormaient. Son mari l’attendait dans leur chambre, et elle existait peut-être comme une étoile qui brillait pour des mondes inconnus. En contemplant le ciel, Tamara se demandait si la lune avait connu le désir de la mort, celui de disparaître à jamais de la face de la nuit et de laisser les hommes orphelins de sa lumière. Sa pauvre lumière empruntée à celle du soleil. » (p. 25)
Larry TREMBLAY, L’orangeraie, Editions Alto, 2013 – Le roman vient d’être publié en France aux éditions de La Table ronde (avec une couverture très sombre, dommage…)
Une semaine au Québec avec Marilyne qui a lu L’ingratitude, de Ying Chen.
Un roman qui fait aussi partie de la liste de Québec-au-trésor chez Karine.
Anne Souris a dit:
Je l’ai lu pendant les vacances, il attend sur mon bureau que je rédige l’article !! Un pur bonheur de lecture, et de fortes émotions, je l’ai dévoré un après-midi en interdisant à quiconque de me parler !! 😉
anne7500 a dit:
C’est un très beau roman !
Electra a dit:
J’en ai beaucoup entendu parler (par Marie-Claude) donc il est sur ma wishlist mais je dois faire des choix car ma PàL va exploser 😉
anne7500 a dit:
On en est tous là… je ne m’en inquiète plus !
Asphodèle a dit:
Encore un livre sur la guerre (je sais qu’il ne faut pas faire l’autruche), mais là c’est trop en ce qui me concerne ! Ton billet est bien beau pourtant ! 😉
anne7500 a dit:
La guerre n’est pas racontée de façon directe, tout est dans la violence psychologique qu’elle entraîne.
Marilyne a dit:
Quelle lecture ! J’avoue avoir peur aussi à la lecture de la présentation et pourtant ton billet est plus qu’évocateur. La manipulation, l’endoctrinement, je ne supporte pas du tout. Mais peut-être, oui.
anne7500 a dit:
Larry Tremblay l’évoque avec beaucoup de sensibilité et sans forcer le trait, finalement. C’était une belle lecture !
Aifelle1 a dit:
J’avais aimé « incendies » et ce que tu dis de ce livre est tentant, mais là en ce moment, je n’ai pas trop envie d’un thème aussi désespérant.
anne7500 a dit:
Il vaut mieux lire certains titres quand on le sent.
lepapou a dit:
Voilà ce que j’en disais de ce coup de cœur 2014 : *En lecture comme en amour, un coup de coeur peut fait très mal.
Le Papou
anne7500 a dit:
La formule est belle et efficace, merci !
Richard a dit:
Un excellent roman et ton excellente chronique est à sa mesure !
anne7500 a dit:
Ce n’était pas évident d’en parler, merci à toi !
Nadège a dit:
Billy me l’avait conseillé l’an dernier, mais je ne l’avais finalement pas retenu. Je ne suis pas sûre d’avoir envie de lire cela maintenant, mais je le retiens bien entendu.
anne7500 a dit:
Billy m’a expliqué hier que le roman marche très moyennement au Québec parce qu’il ne se passe pas là-bas. Dommage, car il est vraiment très beau.
krolfranca a dit:
La référence au film Incendies que j’avais adoré m’invite à noter ce livre !
kathel2 a dit:
Tu as touché juste : il file dans ma liste !
anne7500 a dit:
Et hop-là ! 😉
Grominou a dit:
Tu as raison, c’est un livre dont il n’est pas facile de parler, tu t’en tires fort bien!
alexmotamots a dit:
Ce pays pourrait être tellement de pays, en effet.
Nadael a dit:
Un roman que je note pour plus tard.
anne7500 a dit:
Il en vaut la peine. Peut-être paraîtra-t-il en Folio, comme celui de Jocelyne Saucier.
Suzanne a dit:
Très beau billet pour un roman qui le mérite d’emblée.
anne7500 a dit:
Un roman sensible et intelligent.
jerome a dit:
Je l’ai commencé hier et je suis très secoué par cette lecture. Le manque d’émotion que tu soulignes est nécessaire il me semble pour ne pas tomber dans un récit trop larmoyant. En tout cas pour moi le ton est parfaitement juste.
anne7500 a dit:
En effet, il ne faut pas tomber dans le pathos. C’est une lecture que je recommande !
noukette a dit:
Je me réjouis de ma toute prochaine lecture de ce roman qui a l’air marquant…
anne7500 a dit:
Je crois que tu vas l’aimer.
Laeti a dit:
Bon ok, j’avoue, sur le coup, je n’étais pas plus emballée que cela. Mais je viens de lire la chronique de Noukette… et je commence à clairement changer d’avis 🙂
anne7500 a dit:
« Laissez-vous tenter… » comme dit l’autre… 😉
eveyeshe a dit:
il me plaît bien celui-ci je le rajoute à ma PAL. je ne connais pas l’auteur. d’autres livres de lui à me conseiller?
anne7500 a dit:
C’est un auteur québécois, surtout de théâtre, mais il a aussi écrit comme roman « Le Christ obèse ».
eveyeshe a dit:
je note « Le Christ obèse aussi. Merci