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Archives de Tag: Mémoire d’encrier

Uiesh Quelque part

01 mercredi Mar 2023

Posted by anne7500 in Des Mots au féminin, Des Mots du Québec, Des Mots en Poésie

≈ 9 Commentaires

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Joséphine Bacon, Mémoire d'encrier

Pour ce rendez-vous poétique de mas avec Marilyne, je vous propose de lire quelques poèmes extraits du recueil Uiesh Quelque part de Joséphine Bacon, cette amérindienne innue de Betsiamites. A travers ce livre bilingue (français – innu), elle parle du grand âge, de la vieillesse, des saisons qui passent avec leurs rituels, de la Terre des ancêtres, Nutshimit.

Voici d’abord le prologue de ce livre :

« Aujourd’hui, je suis quelque part dans ma vie.

J’appartiens à la race des aînés. Je veux être poète de tradition orale, parler comme les anciens, les vrais nomades. Je n’ai pas marché Nutshimit, la terre.

Ils me l’ont racontée. J’ai écouté mes origines. Ils m’ont baptisée d’eau, de lac pur.

Un à un, ils nous quittent. Avec eux, s’en vont les mots de toundra, les courants des rivières et le calme des lacs.

Je me sens héritière de leurs paroles, de leur récit, de leur nomadisme. Comme eux, j’ai marché la toundra, j’ai honoré le caribou.

Quelque part, une roche sur une grosse roche indique ma présence. »

Et voici quelques textes picorés dans le recueil, avec des peintures de Maurice Cullen (1866-1934), peintre canadien surtout connu pour ses paysages d’hiver.

La saison de la neige

« Je n’ai pas la démarche féline 

J’ai le dos des femmes ancêtres 

Les jambes arquées 

De celles qui ont portagé 

De celles qui accouchent

En marchant »

« J’ai cent mots à te raconter 

Mon vieil âge

Mes rides

Je n’ai plus l’alerte des pas 

Le souffle court 

J’avance dans mon songe 

Sans fatigue

Je sais entendre les feuilles

J’apprends le monde 

Mon âge vieillit avec moi 

Je n’ai pas cent mots 

Je n’ai pas cent ans »

Passion hivernale 1

« Aujourd’hui le printemps s’est mêlé à l’hiver 

Tout fond 

L’hiver n’a pas dit son dernier mot 

Un ancien imite le vent 

Il m’a envoûtée 

Avec des ailes de perdrix 

Puis a disparu 

Tu m’amènes dans un sentier 

Tu écris dans le vent 

J’avance derrière toi 

J’observe le crayon qui dessine 

Ta liberté »

« J’ai souvenir de Shuaushemiss

Grand-père chasseur 

Je le revois avec son tambour 

Il chante une femme aux cheveux blancs 

Son chant pousse à la danse 

Shuaushemiss dépose le tambour tendrement 

Il me regarde puis éclate de rire 

La femme aux cheveux blancs 

C’est sa terre de chasse 

Couverte de neige 

Avec le vent 

Elle tourbillonne »

Passion hivernale 2

« J’ai découpé mes souvenirs 

Et les ai collés sur mon corps 

Un lac calme 

Reflète mon image 

Je suis Innue dans mes veines 

Je suis Innue dans mon cœur rouge 

Mon ombre se confond à mon âme 

Ma vie vieillit au son du tambour 

Qui rejoint mes rêves »

Joséphine BACON, Uiesh Quelque part, Mémoire d’encrier, 2018

Marilyne vous présente aujourd’hui Albane Gellé.

Mars sera essentiellement placé sous le signe de la francophonie et du féminin. Ce billet entre aussi dans le projet de lectures sur les minorités ethniques chez Ingamnic.

Jonny Appleseed

04 vendredi Déc 2020

Posted by anne7500 in Des Mots canadiens

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Joshua Whitehead, Mémoire d'encrier, Premier Roman

Quatrième de couverture :

Travailleur du cybersexe, Jonny doit rentrer à la réserve dans une semaine pour assister aux funérailles de son beau-père. Pendant ces sept jours, Jonny se raconte : enfance, amitié, amour, sexe, alcool, maquillage, musique, fantômes, espoirs. Le fil des liens familiaux se retisse avec sa mère, sa kokum, ses tantes et oncles. Surgit tout un monde de tendresse.

Poète et romancier bispirituel, Joshua Whitehead est membre oji-cri/nehiyaw de la Première Nation de Peguis, au Manitoba. Jonny Appleseed est son premier roman.

Ce premier roman est sans doute nourri de la propre expérience de son auteur : il nous met dans la peau du narrateur, Jonny Appleseed, qui est parti assez vite de sa réserve pour oser s’épanouir et devenir l’homme bispirituel qu’il est intimement. (Un être bispirituel, c’est, au Canada, quelqu’un qui possède un esprit masculin et un esprit féminin, et aussi quelqu’un qui considère que son genre ne correspond pas à son sexe.) En effet, depuis l’âge de huit ans, Jonny sait qu’il est gay, c’est la première phrase du roman. Son récit commence alors que son beau-père vient de mourir et qu’il doit en quelques jours gagner l’argent nécessaire au voyage vers la réserve de Péguis (Manitoba) pour rejoindre sa mère et la soutenir. Jonny gagne sa vie dans le cybersexe et assume parfaitement ses pratiques sexuelles qu’il nous raconte dans un langage sensuel, fleuri, parfois cru.

Tout en narrant ces quelques jours avant le retour, Jonny se souvient et évoque son enfance à la réserve, l’amour inconditionnel de sa kokum (sa grand-mère), le lien fort et chaotique avec sa mère et la relation tout aussi forte avec son ami d’enfance Tias, qui a lui aussi quitté la réserve pour aller vivre à Winnipeg. Comme dans d’autres romans d’auteurs autochtones, Joshua Whitehead raconte les conditions de vie dans la réserve, le désœuvrement, l’alcoolisme, les bagarres, mais ce qui fait l’originalité de ce premier roman, c’est son narrateur, ce personnage de Jonny Appleseed  qui ose vivre sa sexualité sans complexe et qui déborde d’amour pour les femmes et pour l’ami qui lui ont permis d’être ce qu’il est au plus profond de lui-même. Son parcours est baigné d’émotions contradictoires et d’autodérision, ce qui le rend très attachant. Je suis contente d’avoir découvert ce livre, conseillé par ma dealeuse de Québec préférée, même si j’ai eu du mal à me concentrer sur la lecture (sans doute la morosité ambiante ???).

« Bon sang, j’ai joué les hétéros sur la réserve pour pouvoir être NDN, ici je joue les Blancs pour pouvoir être queer. On ne peut pas toujours tout avoir dans la vie. « 

« La tradition allait me suivre toute ma vie : on s’attend à ce que je coupe du bois pour les cérémonies plutôt que de frire la bannique, que j’apprenne à chasser avec mes oncles plutôt qu’à tricoter avec mes tantes, que je performe la danse des plumes alors que tout ce que je veux c’est faire la danse des clochettes. “Fais de toi un homme” a été le mantra de mon enfance et de mon adolescence, parce que la verge entre mes jambes était pas suffisante pour prouver que j’étais porteur de la masculinité NDN. Il y a des millions de cellules en moi qui se contredisent, des millions de particules qui signalent l’extravagance. À mes yeux la masculinité est un nom féminin .

Et tout se termine en beauté. » (P. 92-93 )

 « Ah les hommes, c’en est presque trop facile : ils sont tous un peu voyeurs et un peu explorateurs. Ils veulent moins jouer au docteur avec toi qu’être le Jacques Cartier de ta ceinture pelvienne. » (P. 177) 

 « J’ai perdu le compte du nombre de fois où on a dit “sacré calvaire” pendant le trajet. J’ai réfléchi au fait que si les NDN disent “sacré calvaire” aussi souvent, c’est sans doute parce qu’on a appris à vivre et à aimer dans le calvaire sacré de l’Apocalypse. » (P. 227) 

Joshua WHITEHEAD, Jonny Appleseed, Mémoire d’encrier 2019

L’avis d’Ingamnic

L’ombre de l’olivier

08 mardi Oct 2019

Posted by anne7500 in Des Mots au féminin, Des Mots du Québec

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Mémoire d'encrier, Premier Roman, Yara El-Ghadban

Quatrième de couverture :

Une enfance palestinienne. Une voix se lève, convoquant la musique, la poésie, la guerre et la résistance. Yuryur aura bientôt dix ans. Née dans un pays de merveilles, bercée par les vagues du golfe Arabo-persique, elle vit à Dubaï une enfance heureuse o se mêlent le sel de la mer et la sauge du thé de Téta Hilweh, sa grand-mère avec qui elle passe les étés au camp de réfugiés dans une Beyrouth que la guerre défigurera.

Dans ce premier roman, Yara El-Ghadban donne la parole à Yuryur, jeune Palestinienne qui est sans doute le double romanesque de son auteure. D’une voix étonnamment mûre pour son âge (bientôt dix ans), Yuryur raconte sa vie à Dubaï où les Palestiniens vivent une « bonne vie » si je puis me permettre cette expression, mais qui reste précaire car les Palestiniens, s’ils peuvent travailler ans problème, n’ont pas de papiers, pas de statut. Les adultes ne veulent pas expliquer en détail leurs difficultés, aussi Yuryur s’est-elle inventé un ami imaginaire, l’Oiseau, qui lui permet de s’évader et de se questionner, de se souvenir et de réfléchir à sa vie d’écolière, à ses amis, à sa famille. L’été, pour échapper à la chaleur torride de Dubaï, la famille retourne chez les grands-parents, à Beyrouth, une ville marquée par la guerre et dont la paix fragile vole en éclat à la fin du roman : Yara El-Ghadban évoque (à hauteur d’enfant) les massacres de Sabrah et Chatila.

Mais le désir de la romancière est de raconter la vie de Palestiniens « ordinaires » en dehors de la guerre. Premiers amours, douceur de vivre, gastronomie, leçons de piano, complicité avec ses tantes, baignades ensoleillées, Yuryur nous raconte cette vie avec bonne humeur et dans une langue poétique et joyeuse à la fois. L’ombre de l’olivier, c’est l’évocation de la Palestine, dont l’olivier est l’emblème, ce sont les ombres sur le symbole de la paix, c’est aussi le très joli premier roman d’une auteure très souriante que j’ai eu la joie de rencontrer lors de la dernière Foire du livre à Bruxelles et que je relirai avec plaisir.

Voilà ce que livre Yara El-Ghadban sur le site de son éditeur Mémoire d’encrier :

« Lorsqu’il est question des Palestiniens, on évoque généralement la guerre, la souffrance, la mort, la violence. Coincé entre l’image de la victime et celle du terroriste, on a du mal à imaginer un Palestinien sourire, rire, rêver, fantasmer, partager un repas tranquille, discuter de musique et de poésie. L’amour et la tendresse, sans angoisse, ni amertume, la famille dans son intimité, mais surtout le bonheur, la magie, le rêve, l’innocence et le deuil de l’enfance qui font partie de l’univers de tout enfant. C’est ce que j’ai voulu écrire. »

(Yara EL GHADBAN, L’ombre de l’olivier, Mémoire d’encrier, 2011

Challenge Petit Bac – Littérature québécoise – Végétal

Me voici…

18 dimanche Nov 2018

Posted by anne7500 in Des Mots du Québec, Des Mots en Poésie

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Chez les ours, Jean Désy, Mémoire d'encrier, Poésie

Me voici

voyageur obstiné

ne trouvant le repos qu’en présence du péril

disposé entre les pierres chutées par milliards

dans la toundra

—

Me voici

saltimbanque obligé

dans la splendeur juteuse des camarines

attentif aux simulies en quête de sang

de cou et d’oreilles

amoureux d’une perdrix aux yeux noirs

de chaque truite qui cherche à mordre mon canot

—

Me voici

coureur de froid et de nord

avec une histoire de parlures métissées

histoire cassée de bois et de portageurs

cherchant les paroles qui jouent avec le vent

—

Dans une tente ronde

je rêve de la meilleure métisserie qui soit

mangeant du lagopède

cuit par une grand-mère ridée sur un feu d’amour

—

Me voici

dans ma langue à venir

univers d’épinettes serrées

—

Enlacé aux écorces

j’attends le meilleur pour courir chanter frémir

voler dans de grands canots rouges

vers les plus divins enchantements

—

Jean DESY, Chez les ours, Mémoire d’encrier, 2012

Manikanetish

26 mardi Juin 2018

Posted by anne7500 in Des Mots au féminin, Des Mots du Québec

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Manikanetish, Mémoire d'encrier, Naomi Fontaine, Québec

Quatrième de couverture :

Une enseignante de français en poste sur une réserve innue de la Côte-Nord raconte la vie de ses élèves qui cherchent à se prendre en main. 
Elle tentera tout pour les sortir de la détresse, même se lancer en théâtre avec eux. 
Dans ces voix, regards et paysages, se détachent la lutte et l’espoir.

Manikanetish, cela veut dire Petite marguerite en innu, C’est le nom d’une école donné en hommage à Petite marguerite, qui n’a jamais eu d’enfant, mais qui en a élevé des dizaines, souvent des difficiles. Manikanetish raconte l’histoire d’une jeune femme, Yammie, qui accepte un poste d’enseignante dans le nord du Québec, dans une réserve : ce faisant, elle lâche son petit ami et revient – non sans appréhension – sur les terres de ses ancêtres. Elle va vraiment tout donner à ses élèves, ceux qui s’en sortent assez bien, ceux qui peinent en français, ceux qui ont tellement de responsabilités extra-scolaires qu’il (ou plutôt elles) ne peuvent se concentrer sur leur réussite scolaire, ceux qui ont un comportement vraiment difficile.

Ce deuxième roman de Naomi Fontaine rend hommage au travail de ces enseignants qui font tout pour faire grandir leurs élèves, leur ouvrir la voie vers le cégep et des études qui leur assureront un avenir. C’est aussi un hommage particulier au cours de français (cela ne pouvait que me toucher), avec les subtilités de l’argumentation, de la grammaire et le défi presque insensé de monter Le Cid avec tous les étudiants de la classe de Yammie, quel que soit leur niveau

Le roman évoque également la rudesse de la vie dans le grand Nord, les drames qui touchent les innus, notamment le suicide. En le lisant j’ai évidemment pensé à d’autres livres qui mettent en scène les « autochtones » du Québec et des personnes qui ont quitté la région (qui l’ont fuie parfois) et qui y reviennent, qui renouent avec leurs racines familiales, avec la nature omniprésente. (Je pense notamment aux Histoires nordiques de Lucie Lachapelle et à Marie-Christine Bernard, elle-même enseignante en cégep et qui accompagne de nombreux étudiants venus des réserves.) Naomi Fontaine conte ce quotidien sous la voix de Yammie, en de courts chapitres fluides et sereins, sans aucun pathos (ce qui, selon moi, est un excellent moyen de laisser les émotions affleurer, évidemment). Les problèmes profonds des réserves semblent être vécus de façon apaisée malgré les difficultés, et tout est fait pour faire tomber les barrières 

« Pleure ma fille. Les choix qu’on fait sont souvent difficiles à expliquer.Et lorsque les gens ne comprennent pas nos choix, ils s’éloignent, parce qu’ils ont peur, tu vois, que ce soit nous qui nous éloignions avant eux.
J’ai su qu’elle ne parlait pas de moi. Elle parlait d’elle y a vingt ans. De sa fuite vers la grande ville. De l’incompréhension puis du rejet de ses parents, de ses sœurs. Sa rébellion envers la règle non écrite de rester à jamais dans la réserve. D’y élever ses enfants. D’y bâtir sa maison. J’ai su qu’elle ressentait ma douleur, par commémoration. »

Naomi FONTAINE, Manikanetish, Mémoire d’encrier, 2017

Le défi du Fil rouge proposait de lire de la littérature autochtone en ce mois de juin.

    Titre Mot unique

Plus besoin de savoir écrire…

26 dimanche Nov 2017

Posted by anne7500 in Des Mots du Québec, Des Mots en Poésie

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Joséphine Bacon, Mémoire d'encrier, Poésie, Québec, Un thé dans la toundra

Plus besoin de savoir écrire

Ni de savoir calculer

Il me suffit de connaître

Les directions

—

Cueillir le champignon

Qui préserve le feu

Immortel

—

J’amène mon bâton de parole

Et m’adresse aux étoiles

Je m’assois pour le repos de mes pieds

Je sais être seule pour entendre

Les aurores boréales

Je dandine

Dans le bleu du bleu

D’une nuit qui endort

Mon grand-père l’ours

—

L’horizon sera là

A m’attendre

Et me conduira à la rivière

Au courant

Trompeur parfois

—

J’arrive enfin

A la terre qui espère

Ma venue

—

Joséphine BACON, Un thé dans la toundra – Nipishapui nete mushuat, Mémoire d’encrier, 2013

La poésie de Joséphine Bacon s’accorde bien au roman que je vous présenterai dans la semaine…

Il est grand temps de rallumer les étoiles

22 dimanche Nov 2015

Posted by anne7500 in Des Mots en Poésie

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Gary Klang, Il est grand temps de rallumer les étoiles, Mémoire d'encrier, Poésie, Québec

Présentation de l’éditeur :

Il est grand temps de rallumer les étoiles marque un tournant dans l’évolution du poète Gary Klang. De la nostalgie et du retour au pays natal, il habite désormais le monde. Le poète, avec ce sixième recueil, sublime l’être et la chose. Quêteur de lumière, il dit la beauté et la fragilité du langage. Comme le sculpteur qui tire l’harmonie du marbre informe, Klang rallume les étoiles et donne sens à l’obscur.

Ce recueil de Gary Klang porte un titre bien approprié par les temps qui courent, ne trouvez-vous pas ? Evidemment il n’a aucun lien avec les attentats de Paris, Gary Clang évoque plutôt son désir de vivre pleinement sa vie d’homme et de poète qui a choisi le Québec comme pays d’exil, parce qu’on parle français et qu’on est « à mi-chemin entre Paris et Port-au-Prince ». Mais la poésie est universelle : merci, Monsieur Klang, d’éclairer et de nourrir de mots les jours que nous vivons.

Je vous propose trois textes (aux pages 28, 33 et 79). Le dernier, inspiré d’Apollinaire, est la clé de voûte de l’ensemble.

—–

Vaincre la peur

Redonner ses couleurs au soleil

Et à l’image d’Ulysse le sage

Poursuivre sans jamais baisser les bras

—

Au bout de la longue nuit d’hiver

Au bout du long voyage

Nous verrons poindre

L’aurore aux doigts de rose

—

Je porte en moi un monde qui n’est point mort

Monde plus vivant peut-être que le vôtre

—–

Dire oui

A tout

Au torrent des étoiles

A la mer de faïence

—

Dire oui

Au long fleuve noir

Au ciel sans lune

Et au soleil

—

Dire oui

A la tristesse

A l’amertume

—

Et puis refaire le monde

Retrouver l’harmonie

Par la géométrie des lignes

—–

(A Guillaume Apollinaire)

Il est grand temps de rallumer les étoiles

Je prends ce vers à celui qui

Sans rime

Et sans façon

Chanta le pont de Seine

Et le nouveau

Pour dire

Ce qu’au tréfonds

Gît par ce temps

De mort

Et de déconfiture

—

Ces heures de haine

Et d’amertume

Où l’on ne sait à quel saint se vouer

Quel Dieu prier

Puisque tout paraît vide

Et que les êtres

Ont perdu sens et l’équilibre

—

Les petits hommes éteignent les flambeaux

Et font de l’ombre sur la terre

—

Il est grand temps

Grand temps

Vous dis-je

De rallumer les étoiles

—

Gary KLANG, Il est grand temps de rallumer les étoiles, Mémoire d’encrier, 2007

Québec en novembre

Chez les ours

08 dimanche Nov 2015

Posted by anne7500 in Des Mots du Québec, Des Mots en Poésie, Non classé

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Chez les ours, Jean Désy, Mémoire d'encrier, Poésie, Québec

Présentation de l’éditeur :

Avec Chez les ours, nous explorons la nordicité, arpentons la terre et les mythes fondateurs. L’auteur Jean Désy passe sa vie à voguer dans le monde de l’autochtonie. Sa poésie est expérience du voyage et usage du Nord. Puisque, « nous voyageons pour manger des fruits immortels. »

Nous voyageons pour apprendre à nommer les choses de la vie, pour agrandir en nous la nature, pour mêler nos corps au parfum des bois et de la glace, dans l’espace absolu. Pour invoquer la parole nue au fond des cabanes.

Chez les ours nous embarque vers le Nord, empruntant le kayak ou la route, gardant en nous l’âme des coureurs de froid. Une plongée dans cette « nature dense et
patiente », et nous voilà reliés à l’esprit du Nord, « là où jamais ne se termine ni la course ni la vie/ ni le rire ni la mort. »

Accompagné des photographies de Isabelle Duval.

Né au Saguenay en 1954, Jean Désy est écrivain, médecin et voyageur. Il vogue entre le Sud et le Nord, entre les mondes de l’autochtonie et de la grande ville, la haute montagne et la toundra, l’écriture et l’enseignement universitaire, la pratique de la médecine et la poésie.

——–

La poésie de Jean Désy (du moins dans le peu que j’ai découvert dans Chez les ours), c’est une plongée dans le grand Nord, une ode à la nature, aux forêts, à la variété des arbres, à la faune, au froid. Un chant aux routes aussi, aux chemins, aux sentiers parcourus dans la neige, au bivouac par moins trente degrés, au courage des hommes qui osent parcourir ces chemins. Un hommage aux Cris, aux Innus, aux Inuits et à bien d’autres qu’il a croisés durant ses voyages.

On sent chez le poète un désir de communion, une reconnaissance envers cette nature, une humilité face à la toundra, où il est si difficile pour l’homme de vivre.

Les photos en noir et blanc d’Isabelle Duval accompagnent les textes de Jean Désy de leur aspect végétal et minéral.

Je vous propose deux textes, le tout premier du recueil, qui me semble refléter son esprit général et un autre sur les ours.

—

Quand on a mené sa barque sur des milliers de kilomètres

pour enfin toucher à la limite

ni pont ni poussière

—

Quand on a fini par emprunter toutes les routes

—————– bûchées défrichées roulées

il reste un dernier chemin à parcourir

la toundra profonde

une voie que nul n’a connue

sauf peut-être une femelle caribou

un ours noir un couple de carcajous discrets

une sterne acrobate

—

Une fois inventé le pays du sud

asphalté carbonisé divisé l’espace disponible

on arrive aux portes de la virginité

là où tout l’avenir est flou

et les coureurs de froid naviguent librement

—

Ebahi on réalise que les nuages flottent différemment

le vent reste seul maître des collines

comme des rochers noirs disséminés sur la mousse

le soleil se fait tendre tandis qu’il frotte sa joue sur l’orizon

—

A genoux

on se dit qu’il vaut la peine de prier

(Page 15)

—

Au bout du monde laisse entrer un ours dans ta ouache

ne fais ni un ni deux quand il s’avancera dans ta cuisine

raconte-lui une histoire

—

Pactise avec Nanuq le puissant blanc à la patte de velours

nageur émérite grand traverseur des baies

————————- d’Hudson et d’Ungava

offre-lui des arpiks comme dessert

—

Dis à l’ours noir que la vie au grand air

est une denrée nécessaire pour la survie

sois fier si pour t’amuser il te lèche un lobe d’oreille

—

Fais entendre une cantate de Bach à une femelle

—————— venue te visiter

parle-lui tout de même de la mort

—————— d’un travailleur forestier

tué par un gros mâle bourru réveillé de travers

—————— un vendredi saint

—

A chacun des ours présents offre à souper

dévorez à pleine gueule de l’esturgeon

—————— de l’omble arctique et du brochet grillé

tout à fait convaincus qu’il reste de la place pour tous

das cette contrée qui est la vôtre

—

Composez un hymne à l’espace vital

pour tous les nanuqs et les humains de la terre

bêtes brillantes et gens sensés

—

Puis la nuit venue

sortez dehors vous asseoir dans la neige

et attendez la prochaine aurore boréale

(page 50)

Arpik (mot inuit) : plaquebière (ou « ronce petit-mûrier », plante typique des pays nordiques)

Nanuq (mot inuit) : ours blanc

 

Jean DESY, Chez les ours, Mémoire d’encrier, 2012

Un billet dédié à Marilyne grâce à qui j’ai découvert ce poète et chez qui vous trouverez d’autres textes

Québec en novembre Désy

 

Bâtons à message Tshissinuatshitakana

21 dimanche Sep 2014

Posted by anne7500 in Des Mots au féminin, Des Mots du Québec, Des Mots en Poésie

≈ 23 Commentaires

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Bâtons à message, Joséphine Bacon, Mémoire d'encrier, Poésie, Québec

Tshishikushkueu,

Femme de l’espace,

ce matin, j’ai revêtu

ma plus belle parure

pour te plaire

—

tu guideras

mes raquettes ornées

de l’unaman de mes ancêtres.

—

Mes pas feutrés

touchent avec respect

cette neige bleue

colorée par le ciel

—

l’étoile de midi

me conduit à Papakassik

où m’attend la graisse

qui élève le chant de mon héritage

quand je pile les os.

——————-

Mes soeurs

les quatre vents

caressent une terre

de lichens et de mousses

de rivières et de lacs,

là où les épinettes blanches

ont parlé à mon père.

——————-

Nous sommes rares

nous sommes riches

—

comme la terre

nous rêvons.

——————

Les anciens

marchaient sans cesse

—

ils tiraient leurs traîneaux

sur la neige

et quand elle fondait,

ils naviguaient.

—

J’ai perdu la trace

de leur passage

vers la terre dénudée

—

sans guide

pour m’orienter.

——————–

Ton coeur dit

d’où tu viens

—

pense à ton âme,

elle t’a donné la source

avant la naissance.

Joséphine BACON, Bâtons à message Tshissinuatshitakana, Mémoire d’encrier, 2009

——————

Joséphine Bacon était l’une des invités du Festival America le week-end dernier. J’ai été très touchée lors de son témoignage dans le débat « Amérindiens« , Marilyne a été touchée et intéressée par ses réflexions sur le passage d’une langue à l’autre. Nous avons décidé toutes les deux de vous présenter un peu de sa poésie ce dimanche.

J’ai choisi le recueil Bâtons à message, Marilyne vous présent Un thé dans la toundra ici.

Présentation de l’auteure sur le site Mémoire d’encrier :

Née en 1947, Joséphine Bacon est amérindienne, Innue de Betsiamites. Réalisatrice et parolière, Joséphine Bacon est considérée comme une auteure phare. Bâtons à message / Tshissinuatshitakana (Mémoire d’encrier, 2009), son premier ouvrage, est un recueil bilingue français / innu-aimun, qui jouit d’un grand succès. Elle a reçu le Prix des lecteurs du Marché de la Poésie de Montréal. Elle a publié en collaboration avec José Acquelin Nous sommes tous des sauvages (Mémoire d’encrier, 2011). À l’automne 2013 paraît son recueil Un thé dans la toundra / Nipishapui nete mushuat (Mémoire d’encrier).

Voici comment ce premier recueil est présenté chez l’éditeur :

Cet ouvrage bilingue (français et innu-aimun) est une invitation au dialogue. Bâtons à message fait référence à un ensemble de repères qui permettent aux nomades de s’orienter à l’intérieur des terres et de retrouver leur voie/voix. Également poétique de la relation, l’ouvrage est fondé sur l’entraide, la solidarité et le partage, nécessaires à la survie du peuple innu. En écho revient la langue de Nutshimit, la langue de la terre, scandée par le tambour. Résonne ainsi l’histoire des Peuples premiers dans leur juste colère et leur lutte pour la dignité, pour le territoire et pour un vivre-ensemble. La poésie de Joséphine Bacon, simple et belle, est hommage au territoire, aux ancêtres et à la langue innu-aimun. Cette poésie-témoignage recoupe l’histoire dans ses zones les plus inédites. Une vision cosmogonique qui nous plonge dans l’intensité de la parole des aînés : l’itinéraire des porteurs de rêves et de visions, les horizons des femmes guides, le courage des hommes chasseurs, les enfants garants de la continuité du voyage et les arbres, infatigables témoins de la route.

Québec en septembre 2014

"Un seul soupir du chat défait tous les noeuds invisibles de l'air. Ce soupir plus léger que la pensée est tout ce que j'attends des livres."

Christian BOBIN, Un assassin blanc comme neige, Gallimard

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