• Anniversaires Maisons d’édition
  • Je remplis ma PAL…
  • Je vide ma PAL…
  • Le Mois belge
  • Lectures thématiques
  • Mémoire 14-18
  • Mots amis à visiter
  • Présentation et contact
  • Quelques projets et challenges

~ Quelques notes de musique et quantité de livres

Archives de Tag: Rentrée littéraire 2013

Il pleuvait des oiseaux

22 lundi Sep 2014

Posted by anne7500 in Des Mots au féminin, Des Mots du Québec

≈ 35 Commentaires

Étiquettes

Denoël, Il pleuvait des oiseaux, Jocelyne Saucier, Québec, Rentrée littéraire 2013

Présentation de l’éditeur :

Une photographe du Herald Tribune part réaliser un reportage sur la région québécoise du Témiscamingue, dont les forêts ont été ravagées par de gigantesques incendies au début du XXesiècle. Elle y trouve une communauté de marginaux fantasques et solitaires, dont Tom et Charlie, deux vieillards qui ont survécu à l’incendie et vivent en ermites au fond des bois. D’abord méfiants puis déterminés à aider la photographe dans son enquête, les deux hommes voient leur quotidien chamboulé. Et, soudain, lorsque arrive Marie-Desneige, octogénaire énigmatique tout juste échappée de sa maison de retraite, la vie, puis contre toute attente l’amour, reprend peu à peu ses droits. Superbe récit, lumineux et tendre, Il pleuvait des oiseaux nous entraîne au plus profond des forêts canadiennes, où le mot liberté prend tout son sens, et l’émotion, brute et vive, jaillit à chaque page.

—

« T’as pas de vie à toi pour t’intéresser autant à celle des autres ? » lance un peu méchamment Charlie à la photographe page 165. Heureusement qu’elle n’a pas eu peur de les trouver, Charlie et Tom, ces deux vieux partis se cacher au fond des bois, et que petit à petit leur vie à eux se dévoile, comme un trésor que révèle la neige qui fond à la fin de l’hiver. De la neige , il y en a aussi qui couronne la tête de Marie-Desneige, la douce petite dame à qui on a volé sa vie. Il y a aussi le feu, les Grands Feux de 1916 qui ont hanté Ted pendant toute sa vie, ce qui ne l’a pas empêché de vivre lui aussi dans une cabane au fond des bois, enfoui dans la nature sauvage et grandiose quelque part au Québec.

La photographe qui n’a pas de nom, ce pourrait être l’auteure elle-même, Jocelyne Saucier, qui donne vie à ces trois compères hors du commun, dont le roman porte le titre de l’exposition que fera la photographe et qui a expliqué lors du tout récent Festival America qu’elle a elle-même une tante à qui on a « volé sa vie » : le livre lui est dédié, pour que tous ceux qui tourneront ses pages voient son nom imprimé comme une reconnaissance de son existence bien réelle.

Ce roman est réjouissant, rafraîchissant, empreint d’une tendresse et d’un respect profonds pour les choix de vie de ses héros et héroïnes. Anti-héros, pourrait-on dire ? Il faut oser mettre en scène trois hommes très âgés, une vieille dame un peu perdue qui les rejoint par hasard et leurs quelques amis marginaux eux aussi, leurs existences cabossées qui osent retrouver un second souffle dans la clandestinité. Il faut oser laisser planer sur le récit l’ombre de la mort, mais toujours en toute simplicité et sérénité. Et puis il y a cette nature omniprésente elle aussi, la rigueur de l’hiver, la rudesse de la vie en cabane, l’émerveillement devant un vol d’outardes, un orignal qui vient s’abreuver au lac ou un discret bouquet printanier au pied d’un arbre.

Vous l’aurez compris, ce récit, qui est aussi un roman d’amour très touchant, se savoure lentement, au rythme des personnages qui prennent tout leur temps pour vivre, au gré de la langue à la fois pudique et poétique de Jocelyne Saucier, une auteure très sympathique dont, après ce joli coup de coeur, j’ai très envie de lire les romans précédents !

Jocelyne SAUCIER, Il pleuvait des oiseaux, Denoël, 2013

Les beaux billets d’Argali, Aifelle et Karine

Québec en septembre 2014

Objectif PAL   Petit Bac 2014

D’une Rentrée à l’autre…

02 samedi Août 2014

Posted by anne7500 in Challenges

≈ 27 Commentaires

Étiquettes

Rentrée littéraire 2013, Rentrée littéraire 2014

Le challenge Rentrée littéraire 2013 s’est terminé ce 31 juillet. Je fais acte de mimétisme sur de nombreuses copines blogueuses et je dresse à mon tour le bilan de mes lectures : j’ai lu 23 livres de cette rentrée 2013, je suis presque à 4 % puisque 1 % égale 6 livres.

Parmi eux, j’en retiens 7, le chiffre parfait : quatre romans français, un belge, un américain et un australien, dont deux premiers romans.

       

          

Sophie (Délivrer des livres) vient de relancer le challenge de la Rentrée 2014. J’ai un peu hésité car je suis moins excitée par cette rentrée mais j’ai déjà lu un roman grâce à Libfly, j’ai deux romans jeunesse prêtés par mes libraires jeunesse préférées (dont un déjà lu, sublime) et j’ai au moins deux titres en vue dès qu’ils seront sur les tables des librairies. Donc… (et comme je suis une faible lectrice) je me suis réinscrite. Si vous voulez le faire à votre tour, c’est par ici.

Challenge Rentrée littéraire 2014

 

Monde sans oiseaux

31 vendredi Jan 2014

Posted by anne7500 in Des Mots au féminin, Des Mots français

≈ 32 Commentaires

Étiquettes

Karin Serres, Monde sans oiseaux, Rentrée littéraire 2013

Présentation de l’éditeur :

« Petite Boîte d’Os » est la fille du pasteur d’une communauté vivant sur les bords d’un lac nordique. Elle grandit dans les senteurs d’algues et d’herbe séchée, et devient une adolescente romantique aux côtés de son amie Blanche. Elle découvre l’amour avec le vieux Joseph, revenu au pays après le « Déluge », enveloppé d’une légende troublante qui le fait passer pour cannibale. 
Dans ce monde à la beauté trompeuse, se profile le spectre d’un passé enfui où vivaient des oiseaux, une espèce aujourd’hui disparue. Le lac, d’apparence si paisible, est le domaine où nagent les cochons fluorescents, et au fond duquel repose une forêt de cercueils, dernière demeure des habitants du village. 
Une histoire d’amour fou aussi poignante qu’envoûtante, un roman écrit comme un conte, terriblement actuel, qui voit la fin d’un monde, puisque l’eau monte inexorablement et que la mort rôde autour du lac…

J’ai lu ce livre pour terminer une ligne de mon Petit Bac 2013, qui se termine aujourd’hui, avec un roman pas épais (je l’avoue !…) et bien sûr parce que j’en ai beaucoup entendu parler dès sa sortie, il a eu son petit succès parmi les blogueurs.

Mes sentiments sont partagés : au début, il faut entrer dans ce monde post-apocalyptique, dans ce village au bord d’un lac dont les eaux montent inexorablement, ses cochons fluorescents amphibies et auto-régénérants à vie… La vie au village a ce côté surréaliste mais semble aussi redevenue primitive : les pulsions sexuelles de l’adolescence se vivent à l’air libre et sans aucun souci moral, un homme gravement handicapé retourne à une vie de bête sauvage, entouré de ses chiens à moitié fous.

Et il y a Petite Boîte d’Os, l’héroïne et narratrice, sa famille (presque) normale, sa jeunesse romantique, le foyer qu’elle crée à son tour avec le vieux Joseph et l’histoire d’amour, longue et émouvante, qu’elle vit avec lui.

Ce sont ces deux aspects de ce roman très court (106 pages très aérées) qui ont provoqué des sentiments partagés : autant l’amour qui unit Petite Boîte d’Os et Jeff est touchante, autant le monde dans lequel ils vivent, les questions qu’il provoque et le genre littéraire choisi par l’auteur m’ont laissée perplexe. J’ai vraiment un peu de mal avec les cochons fluorescents et surnuméraires, mais ce ressenti n’intéressera personne, par contre les thèmes de l’environnement, de l’écologie, de la montée des eaux, des mutations et manipulations génétiques sont effleurés, jamais expliqués et la description de ce monde sous forme de conte merveilleux m’a laissée sur ma faim…

Cela dit, comme c’est l’histoire d’amour et la fin de vie de Petite Boîte d’Os qui est surtout présente das les dernières pages, je ne sors pas de cette lecture avec un avis complètement négatif, d’autant que l’écriture de Karin Serres est belle, poétique, sensible, épurée, comme j’aime. Mais je n’aime pas beaucoup ce traitement du thème post-apocalyptique, j’ai eu du mal à lâcher prise pour me laisser porter par le genre « merveilleux » et – je sais que je vais briser le coeur de certain(e)s blogueurs – je crains que ce livre ne laisse guère de trace dans ma mémoire de lectrice…

« Aller voir sous la peau du lac. Briser la vitre en cas d’urgence. Fracasser le miroir qui reflète notre village sur roulettes, paisible, charmant, ravissant, et moi debout au bord de l’eau plate qui continue de monter en reflétant mon visage paisible, charmant, ravissant. Petite Boîte d’Os la Destructrice, on devrait m’appeler. Ou bien Ravage. Je ne les supporte plus, tous, leurs vies, nos vies ordonnées, régulières et policées. Je déteste notre joli village aux jolies maisons multicolores, bien droites et propres au-dessus de leur joli reflet. Je hais les jours qui se succèdent, toujours les mêmes. L temps passe, je grandis, mon destin se dessine au-dessus de l’eau plate, planche après planche, pas après pas : mariage, enfants, promenade, vaisselle… et je n’en veux pas. » (p. 31-32)

Karin SERRES, Monde sans oiseaux, Stock, 2013

Les avis de Aifelle, Cuné, Jérôme, Maryline, Noukette, Ys et Kathel

Logo Rentrée littéraire 2013   logo Petit Bac 2013

L’autre côté des docks

27 lundi Jan 2014

Posted by anne7500 in Des Mots au féminin, Des Mots nord-américains

≈ 30 Commentaires

Étiquettes

Ivy Pochoda, L'autre côté des docks, Liana Levi, Rentrée littéraire 2013

Présentation de l’éditeur :

Red Hook. L’ancien port de New York, l’ancien quartier des dockers. Une langue de terre tout au sud de Brooklyn, là où l’East River se jette dans la baie. L’horizon y est délimité par la ligne des gratte-ciel de Manhattan. C’est là que les jeunes aimeraient vivre, de l’autre côté des docks. Blancs ou Noirs, habitants du front de mer résidentiel ou des cités, les gens du quartier passent leurs soirées d’été à traîner dans les bars, écouter du rap, boire sans retenue et rêver d’aventure. Une nuit d’été, June et Val, deux adolescentes inséparables, décident de mettre leur canot pneumatique à l’eau sans imaginer que cette dangereuse expédition va changer leur destin et celui du quartier. 

Il ne faut guère en dire plus que la quatrième de couverture pour ne pas déparer le mystère qui court tout au long du roman sur le sort de June. Car des jeunes filles qui se sont aventurées sur l’East River un soir de canicule pour voir leur quartier « de l’autre côté », seule Val revient sur la rive, inconsciente ; June a disparu et on se demandera longtemps ce qui lui est arrivé.

Mais l’essentiel du roman d’Ivy Pochoda n’est pas là : l’intérêt majeur, c’est que l’auteur a fait du quartier de Red Hook un personnage à part entière. Un quartier situé tout au sud de Brooklyn, bien loin du pont de Brooklyn de la (superbe) couverture, l’ancien port de New York et l’ancien quartier des dockers donc, où la guerre des gangs et la violence sont à peinte éteintes et qui n’a pas encore retrouvé une identité attractive pour les touristes et autres artistes qui pourraient s’y promener ou s’y installer. Un quartier dont il n’est pas facile de s’évader, qui offre à l’intrigue un décor de huis clos géant (Ivy Pochoda y a elle-même longtemps vécu et la peinture qu’elle nous offre semble tout à fait authentique). Un huis clos parcouru lui-même de frontières plus ou moins visibles : entre les rues à habitations individuelles et les cours des cités, entre les différentes communautés qui cohabitent plus ou moins harmonieusement, d’une épicerie libanaise à un restaurant grec.

Ce décor de terrains vagues, de tôles froissées, de jetées désolées se pare de couleurs, d’odeurs et surtout de sons sous la plume évocatrice d’Ivy Pochoda. Les cours, les tours, les rues, les quais, les squats prennent vie devant nous et il s’en dégage indéniablement une vraie poésie, une poésie du quotidien, du laid, de l’abandonné.

Comment ne pas user la patience du lecteur dans cet univers ? En suivant un personnage différent à chaque chapitre. En construisant petit à petit une intrigue où le passé des personnages se dévoile par petites touches douloureuses, éclairant leurs dérives et leurs espoirs du présent. Si vous vous embarquez pour Red Hook, vous croiserez un épicier qui espère fédérer la communauté dans l’attente des bateaux de croisière, des femmes qui parlent aux fantômes, un prof de musique qui carbure à l’alcool et à la nostalgie, un tagueur étrangement sage, un jeune noir qui ne s’est jamais battu… et vous vous prendrez de tendresse pour leurs histoires tantôt cassées, tantôt si volontaires qu’on veut y croire avec eux.

Jusqu’à une fin qui m’a cueillie avec émotion, dans la beauté de sa forme et de son propos, un beau point final en forme d’ouverture. Comme dans un « opéra urbain », suivant la belle formule de Dennis Lehane. Et plus j’y pense, plus j’ai adoré ce roman !

« Il (Cree) comprend ce qui retient Gloria ici. Ce n’est pas ce qui existe aujourd’hui, mais ce qui il y avait avant – avant qu’on ne polisse, qu’on ne lessive l’histoire comme l’ancien bars de dockers . Alors qu’il traverse la rue pour quitter cette partie abandonnée du front de mer et rejoindre les cités, il prend conscience des différentes couches qui constituent Red Hook – les tours des cités construites par-dessus les maisons à charpentes de bois, les trottoirs de béton coulés sur les pavés, les lofts qui remplacent les usines, les magasins qui envahissent les entrepôts. Les bars modernes qui phagocytent les anciens rades. Les squelettes des bâtiments oubliés – la raffinerie de sucre et la cale sèche – qui survivent au milieu des nouveaux blocs de béton censés proposer des cadres de vie luxueux. Les vivants qui marchent sur les morts – le front de mer inanimé, ls anciens gangs démembrés, la guerre des drogues éteinte -, tout est encore là. Un quartier de fantômes. L’endroit n’est pas si mal après tout, pense Cree, si on regarde sous la surface, justement là où vit Gloria. » (p. 197)

Ivy POCHODA, L’autre côté des docks, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Adélaïde Pralon, Editions Liana Levi, 2013

L’avis de Kathel qui renvoie à d’autres liens

Et ça y est, nous y voilà dans l’état de New York ! (et dans un bâtiment construit et avec un titre GN + GN)

50 états, 50 billets   Logo Rentrée littéraire 2013

Petit Bac 2014    

 

Pietra viva

15 mercredi Jan 2014

Posted by anne7500 in Des Mots français

≈ 41 Commentaires

Étiquettes

Léonor de Récondo, Michel-Ange, Pietra viva, Rentrée littéraire 2013

Présentation de l’éditeur (en partie) :

Michelangelo, en ce printemps 1505, quitte Rome bouleversé. Il vient de découvrir sans vie le corps d’Andrea, le jeune moine dont la beauté lumineuse le fascinait. Il part choisir à Carrare les marbres du tombeau que le pape Jules II lui a commandé. Pendant six mois, cet artiste de trente ans déjà, à qui sa pietà a valu gloire et renommée, va vivre au rythme de la carrière, sélectionnant les meilleurs blocs, les négociant, organisant leur transport. Sa capacité à discerner la moindre veine dans la montagne a tôt fait de lui gagner la confiance des tailleurs de pierre.
Lors de ses soirées solitaires à l’auberge, avec pour seule compagnie le petit livre de Pétrarque que lui a offert Lorenzo de Medici et la bible d’Andrea, il ne cesse d’interroger le mystère de la mort du moine, tout à son désir impétueux de capturer dans la pierre sa beauté terrestre. (…)

Après Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants, revoici Michel-Ange sous la plume de Léonor De Récondo, et quel bonheur de retrouver cet homme et cet artiste sous cette plume féminine et épurée… Comment bien parler de ce roman pour lequel j’ai un énorme coup de coeur…

Le point de départ (la commande de son tombeau par Jules II) est historique, véridique et très intéressant, la reconstitution historique du travail de Michel-Ange, de la vie des marbriers de Carrare, des conditions de vie de l’époque dans un petit village italien est évocatrice, sans ostentation, mais sans fard (les femmes meurent en couches, les ouvriers sont blessés au travail, voire écrasés par les blocs de marbre) : tous ces éléments se mêlent harmonieusement à ce qui constitue à mon sens le coeur du récit, qui est la confrontation de l’homme et de l’artiste Michelangelo à ses fantômes, celui du moine Andrea et d’autres, plus anciens…

C’est un roman qui parle du chemin du deuil, de la puissance de créer, de la solitude d’un artiste hors-normes. Un roman sensuel où le parfum, le goût d’une galette (comme dans Une rançon…), l’écho d’un rire, le toucher du velours vont se conjuguer pour réveiller les sens, les souvenirs. Le roman d’une amitié improbable entre Michel-Ange, sorte d’ours mal léché (pas vraiment sympathique mais si humain finalement sous le regard humaniste de Léonor De Récondo), et un petit garçon de six ans prénommé Michele qui va aider l’homme meurtri à renouer avec sa propre enfance…

Il y a ainsi des tas de liens plus ou moins évidents, plus ou moins secrets entre les personnages, les moments, les thèmes du roman, habité non seulement du grand sculpteur mais aussi de personnages simples et hauts en couleur comme le petit Michele ou le merveilleux Cavallino. J’ai été extrêmement touchée par de nombreux épisodes et aussi par la magnifique écriture de Léonor De Récondo : son sens de l’épure (pas un poil de gras, comme dirait Jérôme !), son goût des images lumineuses (la lumière de l’été qui accompagne celle des blocs de marbre…), sa simplicité, sa manière de procéder à petites touches, son art du paysage et le langage qu’elle insuffle à la pierre en sculptrice des mots contribuent à faire de Pietra viva un roman vrai, touchant, bouleversant. Un roman parfait, très réussi (différent mais encore plus beau que Rêves oubliés).

C’est la divine surprise de ce début d’année…

« Les tailleurs de pierre riaient de voir cet enfant de la ville, si prompt à les suivre dans la poussière, s’y frotter avac autant de plaisir. Voyant que les adultes ne lui prêtaient pas volontiers leurs ciseaux, il commença à dessiner tout ce qu’il voyait. Et les tailleurs cessèrent de rire tant le talent de l’enfant dépassait l’entendement. Certains prétendirent même que le diable y était pour quelque chose. Mais Michelangelo ne les écoutait déjà plus. Un chemin lumineux et sanguin s’était ouvert en lui et il s’était promis de le suivre toute sa vie.

Sa nourrice portait en elle assez d’amour pour lui faire croire qu’il n’avai rien à craindre et que, si cette voie était la sienne, il ne fallait pas la laisser s’échapper. Pour cela, il devait accomplir une chose : oublier les autres et plonger en lui-même. Ele avait employé ces termes. Et quand, la tête la première, il plongea dans son magma intérieur, il s’aperçut que sa chair était faite de pierre vive. De pietra viva. » (p. 61)

« Parfois, à la simple approche des autres, il sent son âme se salir. Aujourd’hui, il a pourtant consenti avec entrain, presque avec joie, à se rendre chez Toppolino.

Je ne sais plus très bien où j’en suis.

Il a assez d’esprit pour savoir que refuser la rencontre avec autrui, c’est s’appauvrir. Il aimerait se contenter de lui-même et de la compagnie des personnages qui jaillissent de son esprit.

Etre avec moi seul.

Cela suffirait, s’il avait la force de ne jamais imaginer le futur, de ne jamais avoir la nostalgie du passé, de n’être que maintenant et ici-même. » (p. 90)

Léonor de Récondo, Pietra viva, Sabine Wespieser éditeur, 2013

Merci, merci, merci, Mina !

D’autres avis chez Argali, Eimelle, Jostein, Valou… Plein d’avis sur Libfly aussi

Petit Bac 2014   Un-mot-des-titres   Logo Rentrée littéraire 2013

Lady Hunt

29 vendredi Nov 2013

Posted by anne7500 in Des Mots au féminin, Des Mots français

≈ 39 Commentaires

Étiquettes

Actes Sud, Lady Hunt, Rentrée littéraire 2013

Quatrième de couverture :

Laura Kern est hantée par un rêve, le rêve d’une maison qui l’obsède, l’attire autant qu’elle la terrifie. En plus d’envahir ses nuits, de flouter ses jours, le rêve porte une menace : se peut-il qu’il soit le premier symptôme du mal étrange et fatal qui frappa son père, l’héritage d’une malédiction familiale auquel elle n’échappera pas ?
D’autres mystères corrompent bientôt le quotidien de la jeune femme, qui travaille pour une agence immobilière à Paris – plus un effet secondaire qu’une carrière. Tandis qu’elle fait visiter un appartement de l’avenue des Ternes, Laura est témoin de l’inexplicable disparition d’un enfant.
Dans le combat décisif qui l’oppose à l’irrationnel, Laura résiste vaillamment, avec pour armes un poème, une pierre noire, une chanson, des souvenirs… Trouvera- t-elle dans son rêve la clé de l’énigme du réel ?
Sur la hantise du passé qui contamine les possibles, sur le charme des amours maudites, la morsure des liens du sang et les embuscades de la folie, Hélène Frappat trace une cartographie intime et (hyper)sensible de l’effroi et des tourments extralucides de l’âme. Des ruines du parc Monceau à la lande galloise, avec liberté et ampleur elle réinvente dans Lady Hunt le grand roman gothique anglais, et toutes les nuances du sortilège.

Oserais-je dire que je sors de ce roman comme d’un rêve…

Je me suis laissé attirer par la magnifique couverture, puis porter par les rêves, les tâtonnements, les terreurs, les souvenirs de Laura, ses maladresses, son décalage avec la vie « ordinaire », ses tentatives désespérées de trouver un sens, ses hallucinations, ses terreurs encore, ses rêves toujours…

A travers la narration éclatée des trois premières parties du roman, le rouge et le noir dominent : rouge feu, rouge sang, éphélides, rousseur, salomés rouges, noir de la nuit et des forces obscures, noir de l’obsidienne, noir des ombres qui hantent Laura. Le rouge et le noir composent une partition noyée de brume, entre le parc Monceau et les landes bretonnes, de l’avenue des Ternes au pays de Galles.

Si l’on se perd (volontiers, en ce qui me concerne) dans les méandres de l’histoire, il se dégage aussi des traits plus clairs : l’attachement des deux soeurs, Elaine et Laura, le destin tragique du père et l’amour de ses filles, l’épée de Damoclès qui pèse sur les deux femmes depuis leur enfance. La force d’attraction et l’attachement que l’on peut éprouver envers des maisons, maisons d’enfance, maisons rêvées, maisons incarnées… Maisons de légende comme celle où la Dame de Shalott fut condamnée à vivre la malédiction qui lui fut lancée.

Comme les reflets et les ombres dans les miroirs, le roman se fait ainsi chambre d’échos, jeu virtuose entre diverses sources d’inspiration. Il nous dérange, nous invite à croire aux fées, aux sorcières, aux maisons hantées. Nous y accompagnons Laura dans sa douce folie (tiens, une folie, c’est aussi un nom de maison…)

Dans la quête de Laura, dans son lien à la pluie et au vent, il m’a semblé reconnaître un peu du chagrin de l’héroïne des Déferlantes, et c’était bon d’avoir la gorge serrée, de se perdre avec elle dans les souvenirs tragique du père trop tôt parti, dans ses doutes, dans ses errances, guidée par la plume d’Hélène Frappat, poétique, faut-il le dire, délicate et retenue, mais aussi obsédante et lancinante.

J’ai lu ce livre en quelques jours seulement, avec l’impression toutefois en le reprenant à chaque fois que ce que j’avais lu avant se perdait dans la brume, mais je crois, après l’avoir refermé, que sa musique s’insinuera en moi et estompera délicatement le rouge et le noir dans ma mémoire de lectrice.

« Un dimanche s’achève sous la Manche. 

Le dimanche, en fin d’après-midi, personne n’est sûr d’atteindre la nuit. Des particules de nuit recouvrent lentement votre journée de cendres. La cendre ternit l’éclat des lampes. Vous contemplez votre vie comme un passant observe des inconnus derrière une fenêtre. Votre vie soudain étrangère à vos yeux.

Je serre contre moi l’imperméable trop grand de mon père, notre père. Elaine n’en a pas voulu après l’enterrement. Si je disparais sous les tonnes d’eau du tunnel, enveloppée dans l’imperméable froissé transformé en linceul, la femme aux cheveux rouges de mon rêve surgira-t-elle une dernière fois ? » (p. 99)

Hélène FRAPPAT, Lady Hunt, Actes Sud, 2013

Les avis très variés de Cachou, Kathel, Leiloona, Margotte et Skriban

Un très grand merci à Olivier Moss et à PriceMinister pour l’organisation de ces matches de la rentrée littéraire, ainsi qu’aux éditions Actes Sud !

    Logo Rentrée littéraire 2013

La nostalgie heureuse

23 samedi Nov 2013

Posted by anne7500 in De la Belgitude, Non classé

≈ 34 Commentaires

Étiquettes

Albin Michel, Amélie Nothomb, Rentrée littéraire 2013

« Tout ce que l’on aime devient une fiction. La première des miennes fut le Japon. A l’âge de cinq ans, quand on m’en arracha, je commençai à me le raconter. Très vite, les lacunes de mon récit me gênèrent. Que pouvais-je dire du pays que j’avais cru connaître et qui, au fil des années, s’éloignait de mon corps et de ma tête ?

A aucun moment je n’ai décidé d’inventer. Cela s’est fait de soi-même. Il ne s’est jamais agi de glisser le faux dans le vrai, d’habiller le vrai des parures du faux. Ce que l’on a vécu laisse dans la poitrine une musique : c’est celle qu’on s’efforce d’entendre à travers le récit. Il s’agit d’écrire ce son avec les moyens du langage. Cela suppose des coupes et des approximations. On élague pour mettre à nu le trouble qui nous a gagnés. » (p. 7-8)

C’est ainsi que commence le dernier récit publié d’Amélie Nothomb, récit de son voyage au Japon du 27 mars au 6 avril 2012 avec une équipe de France 5 ; elle retourne au Japon à l’occasion de la parution en japonais de Métaphysique des tubes. Son voyage l’a menée principalement à Kobe et à Tokyo mais elle est également passée par Kyoto et Fukushima, commentant ainsi les traces et ravages des deux grands tremblements de terre qui ont secoué le Japon en 1995 et 2011. Elle va retrouver Nisio-san, la nourrice de sa petite enfance à Kobe, Rinri, un ancien fiancé (dont elle a raconté l’histoire dans Ni d’Eve ni d’Adam) et elle pourra évoquer aussi le souvenir de son stage dans les bureaux tokyoïtes de Stupeur et tremblements.

J’ai vu le reportage sur France 5 en septembre, et je me disais que ça vaudrait peut-être la peine de relire un livre d’Amélie Nothomb qui semblait intéressant. Mouais… Je ne sors vraiment pas convaincue de l’aventure.

La romancière au chapeau balade son lecteur de l’intime au général, d’émotions personnelles en drames collectifs. Ce faisant, elle change aussi de style de manière surprenante : quand elle raconte la préparation du voyage, les retrouvailles avec sa nourrice, le style est factuel, sec, les phrases courtes se succèdent et cassent l’émotion réelle qui a dû se vivre (et qui est bien perceptible dans la vidéo) ; par contre, quand elle décrit les différences de styles de vie entre Tokyo et Kyoto, quand elle évoque le paysage dévasté autour de la centrale de Fukushima et les ravages du tsunami sur l’environnement et les habitants, Amélie Nothomb utilise une richesse de phrasé, d’images qui génèrent une véritable émotion (en tout cas, c’est ce que j’ai ressenti) alors que ce qu’elle décrit là est quand même assez extérieur à elle. Il y a là une contradiction, un paradoxe émotionnel qui m’a gênée. Bien sûr, l’auteure nous prévient dès le début, en nous faisant comprendre que la véritable histoire est devenue fiction, mais cette magnifique première page est traitée de manière bien trop artificielle quand la romancière est profondément impliquée personnellement.

Quant à la fin du récit, elle rejoint – en pire à mon sens – certains moments d’analyse des sentiments et émotions ressentis par Amélie après les différentes rencontres et visites vécues pendant son séjour au Japon : une introspection verbeuse, absconse, une fois de plus artificielle. Me voilà donc à nouveau vaccinée contre Amélie Nothomb pour une bonne série d’années, je le crains…

Amélie NOTHOMB, La nostalgie heureuse, Albin Michel, 2013

Logo Rentrée littéraire 2013     logo Petit Bac 2013       Voisins Voisines version Curlz

La Lettre à Helga

18 lundi Nov 2013

Posted by anne7500 in Des Mots islandais

≈ 40 Commentaires

Étiquettes

Birgisson, La Lettre à Helga, Rentrée littéraire 2013, Zulma

Présentation de l’éditeur :

« Mon neveu Marteinn est venu me chercher à la maison de retraite. Je vais passer le plus clair de l’été dans une chambre avec vue plongeante sur la ferme que vous habitiez jadis, Hallgrímur et toi. » Ainsi commence la réponse – combien tardive – de Bjarni Gíslason de Kolkustadir à sa chère Helga, la seule femme qu’il aima, aussi brièvement qu’ardemment, d’un amour impossible.

Et c’est tout un monde qui se ravive : entre son élevage de moutons, les pêches solitaires, et sa charge de contrôleur du fourrage, on découvre l’âpre existence qui fut la sienne tout au long d’un monologue saisissant de vigueur. Car Bjarni Gíslason de Kolkustadir est un homme simple, taillé dans la lave, pétri de poésie et d’attention émerveillée à la nature sauvage.

Ce beau et puissant roman se lit d’une traite, tant on est troublé par l’étrange confession amoureuse d’un éleveur de brebis islandais, d’un homme qui s’est lui-même spolié de l’amour de sa vie.

Je veux lire ce livre depuis qu’on en parle (quand même pas mal) dans la Rentrée littéraire 2013 mais je m’étais tenue un peu à l’écart de ce qu’on disait de lui. Le club de lecture de ma bibliothèque, consacré ce mois-ci aux éditions Zulma, me l’a fait sortir de la PAL (très récente)… et je dois dire que je ne m’attendais pas du tout à ce que j’ai lu !

J’avais en tête « lettre d’amour d’un vieil homme à un amour de jeunesse » et voilà que, dès le début, Bjarni évoque un amour très charnel, en parle d’une manière très précise, d’un érotisme assez cru ! J’avoue qu’il m’a fallu dépasser un rien cette première surprise pour me laisser conduire en Islande le temps d’une lettre. Comme Mina, la forme épistolaire m’a paru un peu artificielle parfois, mais pas à la fin, bizarrement, alors que cette lettre se termine sur une pirouette un peu facile (ou c’est moi qui suis difficile ?)

Cela dit, cette lettre m’a beaucoup plu, j’ai beaucoup aimé ce voyage en Islande dans les années 40-50, cette ode à la terre des ancêtres, aux légendes anciennes qui nourrissent la vie de Bjarni, son ancrage dans l’héritage des anciens, son amour passionné pour les moutons et autres animaux dont il est chargé de contrôler l’approvisionnement en fourrage. Cette passion va évidemment de pair avec les images et les réalités de sa relation avec Helga, et elle explique sans doute aussi qu’il n’ait jamais quitté Unnur tout en étant profondément malheureux avec elle. Des contradictions, des questions que Bjarni ne cesse de se poser ou d’essayer de comprendre tout au long du livre.

L’évocation de la société islandaise du temps de l’occupation américaine m’a aussi beaucoup intéressée, tout comme la vision politique de Bjarni, marquée au coin du bon sens et de la fréquentation de la terre.

L’humour est une belle composante, attendrissante, de ce court roman : le voyage vers les nord, l’oubli puis le retour vers le sud avec le corps d’une vieille femme fumée vaut son pesant de laine de mouton islandais ! Et même si la fin utilise une vieille ficelle d’écriture, il n’empêche qu’elle est pleine d’émotions et qu’elle rend ce vieil homme éminemment humain et digne.

Pas un coup de coeur, mais une belle découverte islandaise, due une fois de plus aux éditions Zulma !

Bergsveinn BIRGISSON, La Lettre à Helga, traduit de l’islandais par Catherine Eyjolfsson, éditions Zulma, 2013

Les avis très contrastés de Cachou, Fransoaz, Lili, Jérôme, Marilyne, Mina, Philisine Cave, entre autres !

Logo Rentrée littéraire 2013   Voisins Voisines version Curlz    Défi PR1

Je suis sa fille

18 vendredi Oct 2013

Posted by anne7500 in Des Mots en Jeunesse

≈ 22 Commentaires

Étiquettes

Benoît Minville, Je suis sa fille, Rentrée littéraire 2013, Sarbacane

Quatrième de couverture :

C’est l’histoire de Joan, qui a été élevée par son père sur fond de hard rock et de westerns. C’est l’histoire du père de Joan, un visage de plus écrasé par le Grand Capital.
C’est l’histoire de Hugo, le meilleur ami de Joan, qui décide de l’accompagner pour quand elle hurle : Il faut que ça change !
Je veux que ça s’arrête !
On va tuer le Grand Patron !
Deux ados embarqués dans un road-trip ébouriffant, sur la N7 direction Nice…
Ils ne savent pas ce qui les attend. L’aventure. L’amour. Les rencontres.
Fuck la crise, vive la vie !

Merci à Sarbacane et la collection Exprim pour l’envoi de ce roman. J’aurais aimé lire et rédiger ce billet plus tôt…

Je l’avoue, je n’ai pas marché à fond derrière Joan et Hugo, son meilleur ami, qui l’accompagne dans la virée sur la Nationale 7, dans une Ford mythique. Peut-être que je n’avais pour rouler que la vieille Fiat Panda pourrie de Djib, le pote du frère d’Hugo, Vasco… (quand je vous dis que j’ai une grosse flemme pas marrante en ce moment…)

Une ado qui se révolte contre le système économique et financier qui a broyé son père, un père qui l’a élevée presque seul, dans l’amour du rock, de la non-violence et une grande ouverture d’esprit : cette énorme révolte, donc, d’une fille qui a toujours été protégée, chouchoutée par tout le monde, je n’y ai cru que moyennement… Et je me suis sentie un peu mal de mépriser ainsi cette audace, cette capacité à s’indigner, cette rage de trouver une coupable mais aussi cette rage de vivre (ah cette Ford) qui anime Joan (son surnom a été rédhibitoire pour moi, il correspond à quelqu’un que je n’apprécie pas dans la vraie vie, et ça a été difficile de surmonter ma réticence – désolée d’avoir été influencée par un truc aussi futile !), rage qui anime aussi Blanche, rencontrée sur la route, et finalement si sage, elle aussi. Mais en même temps, cette « balade » initiatique, sans aucune réaction des adultes, avec des rencontres qui tombent pile poil, un meilleur ami qui a une maturité exceptionnelle, une capacité de réflexion et une culture phénoménales, qui va juste au bon moment trouver la fille qui lui convient en la personne de Blanche, son humour hyper développé et ravageur, ses bras toujours protecteurs, et, cerise sur le gâteau, aucun, aucun adulte qui intervient de manière consistante face à cette virée, les ados ont le champ complètement libre, dans leur monde à eux : je suis désolée, mais c’était trop pour moi… Des ados comme ça, je voudrais bien en rencontrer dans la vraie vie. Mais peut-être allez-vous m’en donner de bons exemples, pour m’apprendre. Peut-être l’auteur veut-il insuffler cette rage à ses lecteurs…

Le roman est stylé, il y a du rythme, de la poésie dans l’écriture de Benoît Minville, mais j’ai parfois dû lire deux fois certaines phrases qui en rajoutaient à l’impression de « too much ».

Une rencontre un peu ratée avec un auteur au look remarquable, qui parle tellement mieux que moi de son roman et de ses sources d’inspiration ici.

Benoît MINVILLE, Je suis sa fille, Exprim’, Sarbacane, 2013

Logo Rentrée littéraire 2013

Retour à Patmos

14 lundi Oct 2013

Posted by anne7500 in De la Belgitude, Des Mots au féminin

≈ 29 Commentaires

Étiquettes

Patricia Emsens, Rentrée littéraire 2013, Retour à Patmos

Quatrième de couverture :

Jean est mort et Marie, sa femme, se rend pour la première fois sans lui à Patmos. Patmos, c’était la maison de Jean, son enfance, ses amis, que Marie va retrouver non sans une certaine crainte. Dès l’arrivée sur l’île, les souvenirs l’assaillent : sa rencontre avec Jean, leur vie, la maladie, sa passion folle pour Pierre, metteur en scène et amant insaisissable avec lequel elle a partagé travail et amour avant que Jean n’entre dans sa vie puis à nouveau, plus tard. Et alors qu’elle avance, incertaine dans cette revisitation du passé, Pierre arrive, rejoignant à Patmos son frère et ses neveux en vacances.
Comme dans une tragédie antique, le destin brouille les cartes, et l’île est un théâtre où se joue la dernière scène d’une histoire qui attendait sa fin.

Je ne sais si c’est l’arrivée bien réelle de l’automne, mais j’ai un peu la flemme d’écrire des billets ces jours-ci… J’ai peur de ne pas rendre assez au joli talent de Patricia Emsens dans ce premier roman. Allez, prenons le bateau, comme Marie et ses enfants et retournons quelques semaines en arrière, au soleil d’été, dans l’île de Patmos…

Elle a du courage, Marie, de revenir là, dans la maison de son mari, mort quelques mois auparavant. elle revient avec leurs deux jeunes enfants, Louise et Philippe, et le fils de Jean né d’un premier mariage, Grégoire, déjà jeune homme et prêt à voler de ses propres ailes. Marie se souvient : de l’histoire de Jean, qu’il lui a confiée avant de se marier avec elle, de son histoire d’amour à elle, costumière, avec Pierre, metteur en scène de théâtre. Des trios amoureux qui marquent le parcours intime de chacun des personnages du roman. Des histoires qui naviguent entre douleur et apaisement, des feux qui renaissent de cendres que l’on croyait endormies.

Un texte sensible, oui, qui parle du deuil, du théâtre, de l’amitié, des hasards bizarres, des rencontres heureuses (ou moins heureuses) qui tissent nos existences, des solidarités entre générations… le tout sous le soleil généreux de Patmos, un cadre qui n’a sûrement pas été choisi par hasard par Patricia Emsens. A part la place un peu dérisoire des enfants (qui font quand même bien partie de la vie de Marie et dont le propre deuil semble inexistant), ce premier roman est vraiment réussi : dans sa construction qui mêle les aller et retours entre passé et présent, dans son écriture fluide et pleine de simplicité, dans ce beau personnage de femme qu’est Marie, entre Pierre le fantasque et Jean le sage et tenace.

Merci, Eimelle, pour la découverte et le partage !

J’ai découvert aussi les éditions des Busclats, qui, selon leur site, « se proposent de publier des écrivains reconnus à qui elles demandent de faire un pas de côté. D’écrire en marge de leur œuvre, un texte court – récit, essai, nouvelles, lettres…- qui sera, selon leur cœur, une fantaisie, un coin de leur jardin secret, un voyage inattendu dans leur imaginaire. Cependant les éditions des Busclats ne s’interdisent pas d’ouvrir leurs pages à des inédits de grands écrivains disparus, ni de se laisser séduire par des textes d’écrivains inconnus et prometteurs. » Et ne vous fiez pas à l’image du livre, la couverture est en réalité d’un vieux rose plus joli, un papier épais, texturé, bref une édition soignée.

Patricia EMSENS, Retour à Patmos, Editions des Busclats, 2013

Logo Rentrée littéraire 2013   Voisins Voisines version Curlz

Défi PR1   logo Petit Bac 2013

← Articles Précédents

"Un seul soupir du chat défait tous les noeuds invisibles de l'air. Ce soupir plus léger que la pensée est tout ce que j'attends des livres."

Christian BOBIN, Un assassin blanc comme neige, Gallimard

Les mots en cours

C'est dur de mourir au printemps

Les challenges maison !

Le Mois belge d'Anne et Mina
Cliquez sur le logo pour accéder au récapitulatif 2022 et déposer vos liens


Mémoire 14-18


Entrez votre adresse mail pour suivre ce blog et recevoir des notifications de nouveaux articles par mail.

Rejoignez les 252 autres abonnés

Articles récents

  • La troisième fille
  • Les notes du jeudi : Alors on danse… (3) Alexandre Glazounov
  • 20 ans avec mon chat
  • Les indiscrétions d’Hercule Poirot
  • Garçon ou fille

Vos mots récents

ToursEtCulture dans La troisième fille
aifelle dans Les notes du jeudi : Alors on…
anne7500 dans 20 ans avec mon chat
anne7500 dans 20 ans avec mon chat
anne7500 dans Les blablas du lundi (39) : Re…

Les catégories de mots

Les Mots d’archives

Méta

  • Inscription
  • Connexion
  • Flux des publications
  • Flux des commentaires
  • WordPress.com
Paperblog : Les meilleurs actualités issues des blogs

Étiquettes

10/18 14-18 2013 2015 2016 Actes Sud Agatha Christie Agatha Raisin enquête Albin Michel Anne Perry Argentine Armel Job automne Babel BD BD du mercredi Camille Saint-Saëns Casterman Concours Reine Elisabeth Dargaud Didier Jeunesse Editions Bruno Doucey Editions Luce Wilquin Emile Verhaeren En train Esperluète éditions Flammarion Folio Gallimard Gallmeister Guy Goffette haïkus Hercule Poirot hiver Jacques Brel Jazz Jean Sébastien Bach Le Livre de poche Le mois anglais Le Mois belge Le Mois belge 2020 Le mois belge d'Anne et Mina Leonard Bernstein Liana Levi Ludwig von Beethoven Maurice Ravel Mozart Mémoire d'encrier Métailié nouvelles Noël nuit Paris Paul Verlaine piano Pieter Aspe Pocket Points polar Poésie Premier Roman Première guerre mondiale printemps Prix Première Quadrature Québec Rentrée littéraire 2012 Rentrée littéraire 2013 Rentrée littéraire 2014 Résistance violoncelle Weyrich Xavier Hanotte Zulma étoiles

Créez un site Web ou un blog gratuitement sur WordPress.com.

  • Suivre Abonné∙e
    • desmotsetdesnotes.wordpress.com
    • Rejoignez 252 autres abonnés
    • Vous disposez déjà dʼun compte WordPress ? Connectez-vous maintenant.
    • desmotsetdesnotes.wordpress.com
    • Personnaliser
    • Suivre Abonné∙e
    • S’inscrire
    • Connexion
    • Signaler ce contenu
    • Voir le site dans le Lecteur
    • Gérer les abonnements
    • Réduire cette barre
 

Chargement des commentaires…