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Léonor de Récondo, Michel-Ange, Pietra viva, Rentrée littéraire 2013
Présentation de l’éditeur (en partie) :
Michelangelo, en ce printemps 1505, quitte Rome bouleversé. Il vient de découvrir sans vie le corps d’Andrea, le jeune moine dont la beauté lumineuse le fascinait. Il part choisir à Carrare les marbres du tombeau que le pape Jules II lui a commandé. Pendant six mois, cet artiste de trente ans déjà, à qui sa pietà a valu gloire et renommée, va vivre au rythme de la carrière, sélectionnant les meilleurs blocs, les négociant, organisant leur transport. Sa capacité à discerner la moindre veine dans la montagne a tôt fait de lui gagner la confiance des tailleurs de pierre.
Lors de ses soirées solitaires à l’auberge, avec pour seule compagnie le petit livre de Pétrarque que lui a offert Lorenzo de Medici et la bible d’Andrea, il ne cesse d’interroger le mystère de la mort du moine, tout à son désir impétueux de capturer dans la pierre sa beauté terrestre. (…)
Après Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants, revoici Michel-Ange sous la plume de Léonor De Récondo, et quel bonheur de retrouver cet homme et cet artiste sous cette plume féminine et épurée… Comment bien parler de ce roman pour lequel j’ai un énorme coup de coeur…
Le point de départ (la commande de son tombeau par Jules II) est historique, véridique et très intéressant, la reconstitution historique du travail de Michel-Ange, de la vie des marbriers de Carrare, des conditions de vie de l’époque dans un petit village italien est évocatrice, sans ostentation, mais sans fard (les femmes meurent en couches, les ouvriers sont blessés au travail, voire écrasés par les blocs de marbre) : tous ces éléments se mêlent harmonieusement à ce qui constitue à mon sens le coeur du récit, qui est la confrontation de l’homme et de l’artiste Michelangelo à ses fantômes, celui du moine Andrea et d’autres, plus anciens…
C’est un roman qui parle du chemin du deuil, de la puissance de créer, de la solitude d’un artiste hors-normes. Un roman sensuel où le parfum, le goût d’une galette (comme dans Une rançon…), l’écho d’un rire, le toucher du velours vont se conjuguer pour réveiller les sens, les souvenirs. Le roman d’une amitié improbable entre Michel-Ange, sorte d’ours mal léché (pas vraiment sympathique mais si humain finalement sous le regard humaniste de Léonor De Récondo), et un petit garçon de six ans prénommé Michele qui va aider l’homme meurtri à renouer avec sa propre enfance…
Il y a ainsi des tas de liens plus ou moins évidents, plus ou moins secrets entre les personnages, les moments, les thèmes du roman, habité non seulement du grand sculpteur mais aussi de personnages simples et hauts en couleur comme le petit Michele ou le merveilleux Cavallino. J’ai été extrêmement touchée par de nombreux épisodes et aussi par la magnifique écriture de Léonor De Récondo : son sens de l’épure (pas un poil de gras, comme dirait Jérôme !), son goût des images lumineuses (la lumière de l’été qui accompagne celle des blocs de marbre…), sa simplicité, sa manière de procéder à petites touches, son art du paysage et le langage qu’elle insuffle à la pierre en sculptrice des mots contribuent à faire de Pietra viva un roman vrai, touchant, bouleversant. Un roman parfait, très réussi (différent mais encore plus beau que Rêves oubliés).
C’est la divine surprise de ce début d’année…
« Les tailleurs de pierre riaient de voir cet enfant de la ville, si prompt à les suivre dans la poussière, s’y frotter avac autant de plaisir. Voyant que les adultes ne lui prêtaient pas volontiers leurs ciseaux, il commença à dessiner tout ce qu’il voyait. Et les tailleurs cessèrent de rire tant le talent de l’enfant dépassait l’entendement. Certains prétendirent même que le diable y était pour quelque chose. Mais Michelangelo ne les écoutait déjà plus. Un chemin lumineux et sanguin s’était ouvert en lui et il s’était promis de le suivre toute sa vie.
Sa nourrice portait en elle assez d’amour pour lui faire croire qu’il n’avai rien à craindre et que, si cette voie était la sienne, il ne fallait pas la laisser s’échapper. Pour cela, il devait accomplir une chose : oublier les autres et plonger en lui-même. Ele avait employé ces termes. Et quand, la tête la première, il plongea dans son magma intérieur, il s’aperçut que sa chair était faite de pierre vive. De pietra viva. » (p. 61)
« Parfois, à la simple approche des autres, il sent son âme se salir. Aujourd’hui, il a pourtant consenti avec entrain, presque avec joie, à se rendre chez Toppolino.
Je ne sais plus très bien où j’en suis.
Il a assez d’esprit pour savoir que refuser la rencontre avec autrui, c’est s’appauvrir. Il aimerait se contenter de lui-même et de la compagnie des personnages qui jaillissent de son esprit.
Etre avec moi seul.
Cela suffirait, s’il avait la force de ne jamais imaginer le futur, de ne jamais avoir la nostalgie du passé, de n’être que maintenant et ici-même. » (p. 90)
Léonor de Récondo, Pietra viva, Sabine Wespieser éditeur, 2013
Merci, merci, merci, Mina !
D’autres avis chez Argali, Eimelle, Jostein, Valou… Plein d’avis sur Libfly aussi
Déjà noté. Et ton joli billet me donne encore plus envie de lire ce roman.
Merci ! Je ne crois pas me tromper en disant qu’il te plaira… 😉
Il fait partie de ma PAC (pile à chroniquer !) mais je peux dire d’ores et déjà que j’ai beaucoup aimé !
La PAC ! Ca m’a fait rire (mais j’avais pensé à autre chose avant !) Difficile de ne pas aimer ce livre quand on aime ses thèmes, me semble-t-il…
Encore plus beau que le précédent ? Ouah ouh ! Comment pourrais-je passer à côté ?
En tout cas, c’est mon choix, j’ai été un peu déçue par Rêves oubliés… (ça manquait d’émotion à mon goût, mais celui-ci… ooooh !!!!)
Il a en effet l’air très sympa et j’ai de la chance : je vais recevoir en LV l’exemplaire de Shelbylee. Bisous
Ce n’est pas sympa, c’est… de la beauté, de la pureté, de l’humanité.
C’est étrange : je suis séduite par ce beau commentaire que tu fais là, mais un peu effrayée par le(s) thématique(s) que développe ce roman. Peut-être, pour moi, n’est-ce pas le moment de lire un texte d’une telle intensité.
Je comprends… si cela peut te rassurer, le roman n’est pas « lourd » à lire, c’est lumineux. Peut-être l’auteur sera-t-elle là au stand Sabine Wespieser au SDL ??
A te lire j’ai l’impression qu’il y’a matière pour un tout gros roman et pourtant c’est un petit format (225 pg) un petit grand livre alors ?!
Je le commence dès que j’ai fini « Géronimo à mal au dos » de Guy Goffette, que je lis grâce à toi (encore).
Bise
Je te le conseille vivement !! Et j’ai réussi à choper Harry Québert à la bibli !!!
Un très joli billet pour un livre que j’ai beaucoup aimé. Merci pour le lien.
Premier livre lu en 2014 et un coup de coeur : quelle belle lecture !!!
Noël est passé, mais j’ai encore des petits cadeaux à faire. Ce titre est pile poil ce que je cherche ! Tu dis un coup de coeur, alors je n’hésite pas !
il fait partie de mes très bons moments de lecture de cette année, ravie qu’il t’ait plu!
J’ai l’impression que c’est le plus beau que j’aie lu jusqu’à présent de la rentrée 2013.
J’étais déjà plus que tenté mais si en plus il n’y a pas un poil de gras, je dois absolument le lire !!!!
Je trouve cette expression tellement… parlante que je me suis permis l’emprunt (avec citation quand même, hein !)
Je le note (commentaire sobre).
Très bien (très sobre aussi)
Malgré tous les billets élogieux, il ne me tente guère. C’est grave docteur ?
C’est ton dernier mot, Aifelle ? 😉
Je suis très heureuse qu’il t’ait autant plu et en redécouvre certaines richesses grâce à toi, merci. 🙂
Tu me flattes, tu me flattes !! 😉 Mais qu’est-ce que je suis contente de l’avoir lu !
Je vais finir par me laisser tenter par ce titre… ^^
Oui, laissez-vous tenter 😉
Un roman qui a l’air très riche.
Oh que oui !
Je l’ai eu en mains, mais à le feuilleter, sais pas. Pourtant les avis sont enthousiastes!
Pas sûre que ce soit ta tasse de thé…
Divine surprise ??? ho là tu me tentes..
C’est un avis personnel, hein…
C’est vraiment tentant. J’ai aimé Michel Ange bizarrement avec Rodin. J’ai mieux compris les filiations et les résonances.
J’aime Rodin aussi !
que d’avis élogieux et pourtant… un petit qqch me retient…
Trop d’avis positif tue le bouquin, c’est ça ? 😉
Coup de coeur + « divine surprise » = grosse incitation à noter ! Tu ne laisses guère le choix !;)
Et si tu ne le lis pas, le grand méchant loup des blogs va te manger !
Bonjour anne, comme le sujet m’intéresse, je suis presque sûre que ce roman va me plaire et me fera connaître un nouvel écrivain. Merci pour ton enthousiasme. Bonne soirée.
J’ai beaucoup beaucoup aimé !! J’espère qu’il te plaira aussi.